Par Recueilli par Luc Bourrianne
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L’ancien chef de gouvernement italien estime que le continent européen bénéficie d’une "fenêtre d’opportunité unique".

Enrico Letta publie « Faire l’Europe dans un monde de brutes » (Fayard) . L’ancien chef de gouvernement italien (d’avril 2013 à février 2014) y développe un plaidoyer ardent pour la construction européenne. Aujourd’hui, il estime que l’Europe bénéficie d’une fenêtre d’opportunité unique avec l’élection d’Emmanuel Macron et le maintien d’Angela Merkel...

Enrico Letta publie « Faire l’Europe dans un monde de brutes » (Fayard) . L’ancien chef de gouvernement italien (d’avril 2013 à février 2014) y développe un plaidoyer ardent pour la construction européenne . Aujourd’hui, il estime que l’Europe bénéficie d’une fenêtre d’opportunité unique avec l’élection d’Emmanuel Macron et le maintien d’Angela Merkel à la tête du gouvernement allemand. Il sera ce jeudi 23 novembre à 17 heures à La Rochelle où il donnera une conférence à l’université.

Comment conciliez-vous militantisme pro-européen et votre notion de « débruxellisation » ?

L’Europe, ça ne se substitue pas à l’identité nationale, ça la complète. C’est pour ça que je parle de « débruxelliser ». Il faut rapprocher l’Europe du citoyen.

Le fait d’être un fervent européen ne gomme pas le fait que je suis un Italien, orgueilleux de l’être, et même un Toscan. Ces trois notions identitaires cohabitent bien ensemble. Il n’y a pas de choix à faire.

"Les raisons qui motivent l'Europe aujourd'hui ne sont plus les mêmes que celles qui l'ont faite"

Pourquoi jugez-vous important de défendre la construction européenne ?

Pour défendre les valeurs que nous portons sur le changement climatique ou la régulation de la finance, par exemple. Les raisons qui motivent l’Europe aujourd’hui ne sont plus les mêmes que celles qui l’ont faite.

Dans les années 50, l’Europe était le centre du monde. Le G7 comptait quatre pays européens. Aujourd’hui, on assiste à un profond changement d’équilibre : l’Europe est de plus en plus petite sur la carte économique. En 2030, l’Allemagne sera la seule puissance européenne du G7 et la 7e puissance mondiale quand la France sera la 11e et l’Italie la 15e… C’est seulement unie que l’Europe pourra continuer d’être influente.

Au-delà de ce sombre tableau sur la perte d’influence européenne, vous êtes optimiste. Pourquoi ?

L’Europe bénéficie d’une fenêtre d’opportunité unique grâce aux récentes élections en France et en Allemagne, qui ont dégagé ou renforcé des gouvernements pro-européens. Ce sont des votes clairs contre le « détricotement » de l’Europe. Ils sont une réaction à un contexte international délicat après le Brexit et l’élection de Trump.

C’est une occasion en or pour faire bouger les choses. Mais il faut aller vite. Il y a un agenda à tenir pour compléter l’union bancaire ou créer un vrai fonds monétaire européen…

…ou pour proposer une réponse à la crise migratoire ?

Absolument. L’Europe a besoin d’instruments, de règles. Il faut se donner les moyens de séparer les réfugiés politiques – que l’on se doit d’accueillir – des migrants économiques avec lesquels on a le droit d’être sélectifs.

Une chose paraît évidente : il va falloir que l’on harmonise l’accueil des réfugiés. On ne peut ni laisser l’Italie, la Grèce et l’Allemagne s’en débrouiller, ni accepter que la Hongrie ou la Pologne continuent de percevoir les fonds structurels sans contribuer à l’accueil.

N’est-il pas contradictoire pour l’Europe de défendre l’État espagnol dans la crise catalane quand elle défend le principe d’autodétermination des peuples partout ailleurs et, qu’à ce titre, elle a par exemple encouragé l’indépendance du Kosovo ?

C’est totalement différent. La crise kosovare était le résultat de l’éclatement d’un État – l’ex-Yougoslavie –. Alors qu’en Espagne, la crise catalane est le résultat d’une absence de dialogue entre les deux parties. D’un point de vue du droit, il n’y a aucun doute quant à l’unité espagnole. Pour l’Europe, il n’est pas question d’aider la Catalogne. Ce serait ouvrir la boîte de Pandore.

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