Au sein des institutions europĂ©ennes, on sait bien que la Hongrie ou la Pologne ne sont pas toujours fiables. A plusieurs reprises, Budapest et Varsovie sont revenues sur des engagements pris vis-Ă -vis de leurs partenaires communautaires. Mais quand câest Berlin qui manque Ă sa parole, lâaffaire prend une tout autre dimension.
Mardi 14 mars, Christian Lindner, le ministre des finances allemand (FDP), a exaspĂ©rĂ© certains de ses homologues en exigeant la modification dâun texte sur la prochaine rĂ©forme du pacte de stabilitĂ© et de croissance, qui limite le dĂ©ficit et la dette publics Ă respectivement 3 % et 60 % du produit intĂ©rieur brut.
Tout avait pourtant Ă©tĂ© calĂ© par les ambassadeurs des Vingt-Sept auprĂšs de lâUnion europĂ©enne (UE) qui, la semaine prĂ©cĂ©dente, en avaient nĂ©gociĂ© les termes, Ă la virgule prĂšs, en concertation avec leur capitale. Il sâagissait de cadrer le dĂ©bat â en listant les points de consensus et ceux qui divisent encore â pour que la Commission puisse revenir devant les Etats membres, mi-avril, avec une proposition de rĂ©forme en bonne et due forme des rĂšgles de gouvernance budgĂ©taires.
Christian Lindner a informĂ© ses homologues de la zone euro de son revirement, lundi, la veille de la rĂ©union du conseil des ministres des finances, arguant que les positions allemandes nâavaient pas suffisamment Ă©tĂ© prises en compte. « Les Ă©changes ont Ă©tĂ© durs », confie un diplomate europĂ©en. Finalement, lâAllemand a obtenu lâajout dâun paragraphe en vertu duquel « la Commission doit encore consulter les Etats membres avant de mettre sur la table une proposition lĂ©gislative pour cette rĂ©forme », a expliquĂ©, mardi, la ministre suĂ©doise Elisabeth Svantesson, dont le pays assure la prĂ©sidence tournante du Conseil de lâUE. « Rien de plus », a-t-elle ajoutĂ©.
« Un trÚs mauvais signal »
« Le train ne pourra pas quitter la gare tant que sa destination ne sera pas claire. Il reste encore beaucoup Ă faire pour que lâAllemagne puisse accepter un accord », a pour sa part commentĂ© Christian Lindner, trĂšs attachĂ© Ă lâorthodoxie budgĂ©taire, en quittant le conseil des ministres. « Sur le fond, il nây a pas de changement dans le texte. Mais Lindner a mis un coup de pression politique sur la Commission sur le thĂšme : si vous ne tenez pas assez compte de notre positionâŠÂ », dĂ©crypte un diplomate. Sa prestation pourrait nĂ©anmoins avoir pour consĂ©quence de retarder la rĂ©forme, qui ne manquera pas de susciter des dĂ©bats houleux entre les Vingt-Sept.
Tout ça pour ça ? En rĂ©alitĂ©, lâAllemagne pouvait exprimer ses rĂ©ticences sur le texte la semaine derniĂšre, lorsquâil Ă©tait dĂ©battu entre les ambassadeurs. Câest sa volte-face de derniĂšre minute qui choque Ă Bruxelles. « LâUE est fondĂ©e sur le droit et la confiance entre Etats membres », juge SĂ©bastien Maillard, directeur de lâInstitut Jacques-Delors, pour qui « ce type de comportement envoie un trĂšs mauvais signal, celui que tout accord peut ĂȘtre remis en cause. Si lâAllemagne, un pays fondateur de lâUE, le fait, pourquoi les autres ne le feraient pas ? »
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