Un divorce entre les mains de l’UE. A deux jours de la date de sortie prévue, la pression monte sur Theresa May. Après des visites express à Berlin et Paris mardi 9 avril, la Première ministre britannique se rend mercredi 10 avril à Bruxelles pour un sommet spécial sur le Brexit, où elle va essayer de convaincre ses partenaires européens de lui accorder un nouveau report, jusqu’au 30 juin.
La dirigeante avait déjà obtenu un premier délai jusqu’au 12 avril, alors que le divorce devait initialement avoir lieu le 29 mars. Ce laps de temps supplémentaire servirait à sortir de l’impasse sur le Brexit, symbolisée par les trois rejets successifs du traité de retrait de Theresa May par le Parlement britannique depuis le début de l’année.
Une extension problématique
Alors que la demande de la locataire de Downing Street nécessite l’accord des 27 Etats membres de l’UE pour être validée, ces derniers n’ont pas l’intention de lui signer un chèque en blanc. Ils seraient en effet prêts à accorder au Royaume-Uni un report du Brexit au-delà du 12 avril, mais avec des conditions strictes, ont déclaré mardi 9 avril plusieurs ministres européens. Pour Amélie de Montchalin, la nouvelle secrétaire d’Etat française aux affaires européennes, cette requête doit être assortie «d’un plan politique crédible qui explique ce qu’il se passera pendant cette extension».
PM @Theresa_May is in Berlin, where she has met Chancellor Merkel to discuss Brexit ahead of tomorrow’s European Council.https://t.co/rZtDS0dRkZ pic.twitter.com/jZSZSt9pC1
— UK Prime Minister (@10DowningStreet) 9 avril 2019
Mais des désaccords se font jour sur la question de la durée du report. Le président du Conseil européen Donald Tusk plaide pour une extension longue, d’un an, qui pourrait prendre fin à tout moment en cas de feu vert des députés britanniques. Une option rendue possible par les mesures prises par le Royaume-Uni, lundi 8 avril, pour participer aux élections européennes, le 23 mai. Londres a précisé qu’il avait toujours l’intention de quitter l’UE avant le 22 mai, pour ne pas avoir besoin d’organiser ce scrutin dans l’urgence.
Cette perspective de report long n’est pas du goût de certains côté européen, qui «veulent garder la possibilité d’une sortie sans accord pour pousser les Britanniques à se décider sur un compromis», explique Elvire Fabry, chercheuse à l’Institut Jacques Delors. Ceux-ci pencheraient donc plutôt pour la date demandée par Theresa May, le 30 juin.
Ils redoutent en effet une prise en otage de l’UE par le Royaume-Uni s’il en reste membre pour une période indéterminée. Des craintes confirmées par les propos d’un député britannique conservateur, Jacob Rees-Mogg, dimanche 7 avril. «Si une longue extension nous laisse coincés dans l’UE, nous devrions nous montrer aussi pénibles que possible», a-t-il menacé.
.@MichelBarnier in #GAC50: “Any extension should serve a purpose. The length should be proportional to the objective. Our objective is an orderly withdrawal. “No-deal” will never by the EU’s decision. In order to avoid “no-deal”, the #UK needs to agree to a deal.” #Brexit
— Daniel Ferrie (@DanielFerrie) 9 avril 2019
Un «no deal» trop risqué
Théoriquement, il est tout à fait possible d’imaginer les Européens, fatigués d’un Brexit qui traîne en longueur, refuser un nouveau report à Theresa May. Ce qui signifierait très probablement une sortie du Royaume-Uni sans accord.
Mais, en pratique, l’UE a tout à perdre avec un «no deal». En effet, les entreprises qui importent ou exportent outre-Manche pourraient subir de nouvelles taxes, et les transports (avions, trains…) seraient soumis à des perturbations. Selon un rapport du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), un divorce brutal amputerait même le PIB européen de 0,8 %, et de 2,8 % côté britannique.