European Commission President Ursula von der Leyen (R) and President of the European Council Charles Michel (L) leave after a joint press during a special meeting of the European Council at The European Council Building in Brussels on May 31, 2022. - European Union leaders agreed late May 30, 2022 to ban more than two-thirds of Russian oil imports, tightening economic screws on the country even as Moscow's forces made gains in the eastern Donbas region of war-ravaged Ukraine. (Photo by JOHN THYS / AFP)

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le président du Conseil européen, Charles Michel, ont annoncé l'accord des Vingt-Sept pour un embargo partiel du pétrole russe, le 31 mai 2022.

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Cette fois, Volodymyr Zelensky a été entendu. En préambule du Conseil européen du lundi 30 mai, le président ukrainien s'est adressé aux Vingt-Sept chefs d'État européens sur un ton calme, presque apaisé. "Il est temps d'arrêter vos divisions, vos querelles internes, de montrer votre unité", a exhorté le héros de Kiev.

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Quelques heures plus tard, une poignée de secondes avant minuit, l'Union européenne s'accordait - enfin ! - pour bannir 90% de ses importations de pétrole russe. "Il s'agit d'un tournant : les Européens choisissent de se faire mal pour faire mal à la Russie, souligne Cyrille Bret, chercheur associé à l'Institut Jacques Delors. Auparavant, on infligeait des sanctions à la Russie pour lui faire changer de cap. Là, on inflige cette sanction à la Russie pour couper les ponts avec elle."

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Les négociations autour de l'or noir de Moscou auront duré près d'un mois. L'UE mettra fin d'ici 2023 à ses achats par voie maritime, soit deux tiers de ses importations. De plus, l'Allemagne et la Pologne ont décidé de ne plus consommer de pétrole russe, ce qui fait passer l'embargo européen à 90%. "Il s'agit d'une décision importante, d'un palier supplémentaire dans la pression mise par l'UE sur la Russie, estime Ricardo Borges de Castro, directeur adjoint du European Policy Center. Ce paquet de sanctions a des conséquences majeures, très concrètes, sur l'économie européenne, ce qui explique qu'il était si difficile à concrétiser."

Des aménagements majeurs ont été accordés à la Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque, qui peuvent continuer de s'approvisionner via l'oléoduc russe de Droujba, au moins jusqu'à 2024. Triomphant, Viktor Orban paradait sur les réseaux sociaux à 1h du matin, se vantant d'avoir "vaincu la Commission européenne" et son "idée perverse" de bannir le pétrole russe de Hongrie.

"Vont-ils couper le gaz ?"

À Bruxelles, se pose désormais la question de la suite des événements. Les pays baltes et certains États de l'est de l'Europe réclament déjà un septième paquet de sanctions contre la Russie, afin de maintenir la pression sur le Kremlin. Mais ces dernières semaines, éprouvantes pour l'unité européenne, pourraient marquer une rupture dans l'effort de sanctions de l'UE. "Les sanctions sont extrêmement importantes, elles ont largement dépassé le stade du symbolique et commencent à endommager fortement la santé économique de l'Europe, prévient Cyrille Bret. Il faut marquer une pause, laisser les sanctions produire leurs effets. L'Ukraine a besoin d'une Europe en bonne santé, y compris économique."

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Les Vingt-Sept n'ont en revanche aucune intention de ralentir leur soutien massif à l'Ukraine sur les plans militaires et financiers. Mais les regards se tournent désormais vers Moscou, et ses potentielles représailles contre l'UE après cet embargo pétrolier. "Vont-ils couper le gaz ?, s'interroge ainsi Ricardo Borges de Castro. Nous devons faire attention, car de nombreux pays européens n'ont tout simplement pas les infrastructures pour se passer de l'énergie russe, et vous ne pouvez pas modifier vos infrastructures du jour au lendemain. Nous sommes dans un marathon, et ces décisions européennes n'auront pas un impact immédiat sur le cours de la guerre en Ukraine."

Mardi matin, le cours du pétrole a encore grimpé après l'annonce de l'embargo européen. Pour l'instant, les consommateurs européens trinquent, et les finances russes continuent de tourner.

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