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En Bulgarie, l'instabilité politique perdure

Après la chute du gouvernement pro-européen de Kiril Petkov cet été, les sondages prédisent qu'aucune majorité claire ne pourra émerger des élections législatives qui se tiennent ce dimanche. Le rapport à la Russie est un clivage structurant du paysage politique.

Le Parlement bulgare, à Sofia. Les électeurs bulgares votent ce dimanche, pour quatrième fois en moins de dix-huit mois.
Le Parlement bulgare, à Sofia. Les électeurs bulgares votent ce dimanche, pour quatrième fois en moins de dix-huit mois. (Dimitar Dilkoff/AFP)

Par Vincent Collen

Publié le 30 sept. 2022 à 08:30

Les électeurs bulgares votent ce dimanche, pour la quatrième fois en moins de dix-huit mois. Ces élections législatives ne devraient malheureusement pas permettre de sortir le pays de 7 millions d'habitants de l'impasse politique dans laquelle il se trouve. De nombreux politologues prévoient la convocation d'un cinquième scrutin dès le début de l'année prochaine, car aucune coalition stable de partis ne devrait ressortir des urnes.

Le pays le plus pauvre de l'Union européenne est miné par l'instabilité politique depuis le printemps 2021, après des élections qui avaient mis fin à douze années de règne de Boïko Borissov. Le dernier Premier ministre en date, le très pro-européen Kiril Petkov, est tombé cet été après la défection d'un des partis de sa fragile coalition, qui a tenu à peine huit mois.

La corruption « à un niveau pandémique »

Les sondages prédisent un paysage politique tout aussi éclaté à l'issue du vote de dimanche, favorisé par le mode de scrutin. Le GERB de Boïko Borissov arriverait en tête avec plus de 20 % des voix, suivi du parti de Kiril Petkov, baptisé « Nous continuons le changement », crédité de 17 % selon un sondage Market Links.

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Mais une alliance des deux ex-Premiers ministres semble exclue, tant Kiril Petkov a construit son succès sur l'opposition à Boïko Borissov, qu'il accuse d'avoir installé un système de corruption à grande échelle dans le pays. « La corruption est à un niveau pandémique en Bulgarie », déplore Mariyan Sabev, du Center for the Study of Democracy à Sofia.

La guerre a renforcé les lignes rouges

« Comme dans d'autres pays européens, la montée des partis antisystème réduit les possibilités de coalition, commente Lukas Macek, spécialiste de l'Europe centrale et orientale à l'Institut Jacques-Delors. En Bulgarie, ce problème est accentué par une scène politique divisée à l'extrême, ce qui produit des coalitions particulièrement instables. Boïko Borissov suscite un fort rejet des autres partis, mais ces derniers sont incapables de se mettre d'accord ».

Quant au centriste pro-occidental Kiril Petkov, il peine lui aussi à rassembler, notamment les petits partis plus ou moins proches de la Russie comme le Parti socialiste, héritier du PC de l'ère soviétique, ou l'extrême droite Renaissance, en pleine ascension. « La guerre a renforcé les lignes rouges pour beaucoup de formations politiques, ce qui rend les accords encore plus difficiles », analyse Mariyan Sabev.

La Russie, un clivage structurant

« Dans un contexte où la droite et la gauche ne veulent plus dire grand-chose, le rapport à la Russie est un clivage traditionnellement structurant en Bulgarie, et c'est évidemment encore plus le cas depuis le début de la guerre en Ukraine », analyse Nadège Ragaru, directrice de recherche à Sciences Po. Les pro-Russes sont nombreux au sein du Parti socialiste notamment, et Renaissance, crédité d'une belle progression avec environ 9 % des intentions de vote, affiche clairement un programme antieuropéen et prorusse.

La Bulgarie est l'un des premiers pays d'Europe, avec la Pologne, auquel la compagnie russe Gazprom a coupé le gaz en avril , parce que le gouvernement de Kiril Petkov refusait le système de paiement en roubles exigé par le Kremlin. Le pays consomme relativement peu de gaz, ce qui relativise l'impact économique de cette décision. Elle est violemment contestée néanmoins par plusieurs partis qui entretiennent l'idée que la fin du gaz russe fait bondir les prix de l'énergie.

L'inflation dépasse 17 % dans un pays dont le PIB par habitant est quatre fois inférieur à la moyenne de l'UE. Le gouvernement provisoire, aux commandes depuis le départ de Kiril Petkov en juillet, a même annoncé qu'il voulait signer un nouveau contrat avec Gazprom, sans résultat pour l'instant.

Un gouvernement de techniciens ?

« On peut imaginer une nouvelle coalition comprenant des partis prorusses minoritaires comme en Italie, avance Lukas Macek. On passerait alors d'un gouvernement de Kiril Petkov très ferme vis-à-vis de Moscou à un exécutif beaucoup moins clair sur la question. Cela ne changerait pas fondamentalement le rapport de force au sein de l'UE, car la Bulgarie n'a pas le même poids que l'Italie. Mais cela peut contribuer à un glissement. »

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L'hypothèse la plus probable cependant, au vu des sondages, serait un gouvernement de techniciens qui expédierait les affaires courantes… en attendant de nouvelles élections.

Vincent Collen

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