Explosion des prix de l’énergie : les ménages précaires mis à rude épreuve

La guerre en Ukraine a entraîné une augmentation des coûts de l’essence et de l’énergie, plongeant les ménages les plus fragiles dans une précarité encore plus grande. A titre d’exemple, en août les prix de l’énergie ont augmenté de 38,3% dans la zone euro. [Delmiro Junior/Shutterstock]

Dans un sondage publié mercredi (7 septembre), le Secours populaire et l’Ipsos mettent en lumière la précarité dans laquelle se retrouvent les ménages français les plus modestes face à l’inflation des prix de l’énergie.

La guerre en Ukraine a entraîné une augmentation des coûts de l’énergie plongeant les ménages les plus fragiles dans une précarité encore plus grande. A titre d’exemple, en août les prix de l’énergie ont augmenté de 38,3 % dans la zone euro.

« Il y a une augmentation des factures d’alimentation, de transports et d’énergie. Le contexte de forte inflation touche davantage les plus fragiles », alerte Malika Tabti, secrétaire nationale du Secours populaire lors d’une conférence présentant les résultats du sondage.

Pour réaliser ce sondage, 1010 Françaises et Français de 16 ans et plus ont été interrogées du 1er au 5 juillet 2022.

Les résultats sont sans appel : 45 % des Français rencontrent des difficultés pour payer leurs frais de transport, soit une augmentation de 15 points par rapport à 2021. En parallèle, 41 % des sondés rencontrent des difficultés pour payer leurs dépenses d’énergie, une hausse de 5 points par rapport à l’année précédente.

Pierre Latrille de l’Ipsos tire la sonnette d’alarme : « C’est une année particulière, il y a une détérioration très forte des indicateurs. Il n’y a pas une once d’espoir dans les résultats. »

Edith, 47 ans et mère de quatre enfants, explique avoir des difficultés quotidiennes pour faire ses courses, subvenir aux besoins de ses enfants et payer ses factures de gaz et d’électricité.

« Avoir du mal à payer ses factures, ça ne veut pas dire ne pas réussir à les payer. Par contre, ça veut dire devoir rogner sur d’autres postes budgétaires. Le transport, le chauffage ainsi que l’électricité, sont des postes de dépense incompressibles », analyse Camille Defard, chercheuse en politique européenne de l’énergie à l’Institut Jacques Delors.

Triste record : d’après les résultats du sondage, 65 % des Français disent connaître au moins une personne de leur entourage familial ou amical confrontée à la pauvreté (+10 % par rapport à 2021).

« Jamais on n’avait vécu ça », souffle Pierre Latrille.

Pour soutenir les ménages français, le gouvernement a mis en place plusieurs mesures dont  une remise sur le carburant ou bien le fameux bouclier tarifaire, annoncé en juillet, qui permet de plafonner la hausse des prix de l’énergie à 4%.

Mais lundi (5 septembre), lors d’un conférence presse, Emmanuel Macron a annoncé que cette initiative ne pourrait pas continuer « pendant des mois et des mois ». De quoi faire plonger les foyers modestes encore un peu plus dans la précarité.

Le président a également rappelé à la sobriété énergétique, recommandant de limiter la température à 19°C cet hiver dans les maisons et appartements, en mettant « le chauffage un peu moins fort que d’habitude ». 

« C’est une mesure nécessaire mais qui ne concernera pas tout le monde », explique Camille Defard, « un certain nombre de foyers n’ont malheureusement, encore aujourd’hui, pas les moyens de chauffer correctement l’hiver ».

Un phénomène qui touche toute l’Europe

En Europe, la France est loin d’être un cas isolé.

« Dans tous les pays, ce sont les ménages les plus vulnérables qui sont touchés en premier. Pour les ménages qui souffraient déjà de précarité énergétique, la situation est encore pire aujourd’hui à cause de la guerre en Ukraine », constate Camille Defard.

Pour tenter d’aider les ménages à faire face à l’inflation, plusieurs gouvernements mettent en place des mesures d’urgence. Le chancelier allemand Olaf Scholz a annoncé dimanche (4 septembre) la distribution de chèques énergies de 300 euros pour les retraités et 200 euros pour les étudiants.

En Espagne, depuis le 1er septembre et pour les quatre prochains mois, des trains sont gratuits pour limiter les déplacements en voiture.

L’Italie de son côté a adopté en août une série de mesures d’un total de 17 milliards d’euros pour venir en aide aux ménages et aux entreprises parmi lesquelles le prolongement de la réduction de 30 centimes des taxes par litre de carburant et une revalorisation de 2 % des plus petites retraites.

« Il y a eu une forte réaction de tous les gouvernements face au risque social », note Camille Defard.

C’est dans ce contexte de crise que les ministres européens de l’Energie se rencontreront vendredi (9 septembre) à Bruxelles pour un conseil extraordinaire consacrée à l’inflation.

« La Commission aussi essaie d’actionner les moyens qu’elle peut. C’est une séquence politique assez incroyable », conclut Camille Defard.

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