Le préseident français Emmanuel Macron (C), le président du Conseil européen Charles Michel (G) et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen s'expriment devant la presse à l'issue du sommet de Versailles sur l'invasion russe de l'Ukraine, le 11 mars 2022

Le président Emmanuel Macron, le président du Conseil européen Charles Michel (à gauche) et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à l'issue du sommet de Versailles, le 11 mars 2022.

afp.com/Ludovic MARIN

"Nous vivons un moment européen", avait écrit Emmanuel Macron en janvier dans son mot de bienvenue, sur le site de la présidence française du Conseil de l'Union européenne. Aujourd'hui, un conseiller loue sans ironie la "prescience" du chef de l'Etat à propos des priorités sélectionnées pour le semestre. Quand Paris a pensé le programme du sommet de Versailles, point d'orgue de sa présidence tournante, personne n'imaginait qu'il se tiendrait en temps de guerre. Bien sûr, ces jeudi 10 et vendredi 11 mars, les Vingt-Sept ont consacré de longues heures à l'Ukraine. Mais la défense, la souveraineté ou la réduction des dépendances de l'Union européenne figuraient au menu avant l'invasion russe.

Publicité
LIRE AUSSI : Ukraine : "Veulent-ils une guerre généralisée ?" L'inquiétude de l'ex-patron du Quai d'Orsay

"Si, il y a quelques années, certains pouvaient voir dans la souveraineté européenne un slogan ou une fantaisie française, chacun comprend aujourd'hui que c'est un impératif", a lancé le président de la République dans la galerie des Batailles du château du Roi-soleil. Le vent semble avoir tourné durablement. "La guerre a donné du poids aux idées portées par Macron, y compris sur la réduction de la dépendance face à la Russie, salue une source européenne. 70% de ce qu'il propose est repris par les autres dirigeants."

La déclaration de Versailles adoptée ce 10 mars a l'allure d'une feuille de route pour cette nouvelle Europe plus résiliente. Défense, énergie, alimentation... la Commission européenne est chargée de faire des propositions concrètes avant de nouveaux sommets à la fin du mois et en mai prochain. Les Vingt-Sept veulent aussi s'engager sur le chemin de l'autosuffisance dans les matériaux rares, les semi-conducteurs ou le numérique. Des domaines en grande partie chapeautés à Bruxelles par le français Thierry Breton. En coulisses, les Européens discutent aussi d'une mutualisation des coûts du conflit dans les domaines militaires ou énergétiques.

"Heureusement que c'est la France qui a la présidence"

Sous la contrainte des événements, l'Europe semble donc vivre son "moment français". D'autant plus que le hasard du calendrier veut que, pour la première fois depuis treize ans, les ministres et les diplomates hexagonaux animent les réunions qui s'enchaînent à un rythme effréné à Bruxelles depuis le 24 février. "Heureusement que c'est la France qui a la présidence", glissent des diplomates européens.

LIRE AUSSI : Avec la guerre en Ukraine, une Allemagne bouleversée et l'émergence d'un nouveau monde

Les mois de préparation intensive des équipes se sont révélés encore plus précieux que prévu. Résultat, les dossiers aboutissent extrêmement vite. Ainsi, une semaine après le début des hostilités, les ministres de l'Intérieur ont pu déclencher un régime inédit de protection temporaire pour les Ukrainiens réfugiés dans l'Union européenne, car le travail technique nécessaire avait été mené tambour battant.

Alors que les morts s'accumulent sous les bombes de Poutine, difficile pourtant de lancer des cocoricos trop vigoureux. L'unité des Européens est là, mais elle reste fragile. Les divergences de vues demeurent, mais sont mises en sourdine. "Les événements donnent raison à ceux qui prônaient une vision géopolitique de l'Europe, mais à quel prix ?, se désole de son côté Nicole Gnesotto, vice-présidente de l'Institut Jacques Delors. Je préférais une Europe endormie dans un continent en paix à une Europe puissance dans un continent en guerre."

Publicité