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POINT DE VUE. « Le risque terroriste en France aujourd’hui »

Où en est le risque terroriste en France ? L’analyse de Cyrille Bret, chercheur associé à l’Institut Jacques Delors et enseignant à Sciences-Po.

Le 13 octobre dernier, des forces de l’ordre sécurisent les alentours de la cité scolaire Gambetta d’Arras où un enseignant vient d’être tué et deux personnels blessés lors d’un attentat terroriste.
Le 13 octobre dernier, des forces de l’ordre sécurisent les alentours de la cité scolaire Gambetta d’Arras où un enseignant vient d’être tué et deux personnels blessés lors d’un attentat terroriste. | AFP/ FRANCOIS LO PRESTI
  • Le 13 octobre dernier, des forces de l’ordre sécurisent les alentours de la cité scolaire Gambetta d’Arras où un enseignant vient d’être tué et deux personnels blessés lors d’un attentat terroriste.
    Le 13 octobre dernier, des forces de l’ordre sécurisent les alentours de la cité scolaire Gambetta d’Arras où un enseignant vient d’être tué et deux personnels blessés lors d’un attentat terroriste. | AFP/ FRANCOIS LO PRESTI

Deux assassinats tragiques font-ils une vague d’attentats terroristes ? Ou, pour le dire autrement, les meurtres de Dominique Bernard et du touriste allemand du pont de Bir-Hakeim, respectivement les 13 octobre et 2 décembre derniers, au nom (ou au prétexte) de la défense de l’islam, annoncent-ils le retour des violences terroristes sur le territoire national ? Sommes-nous à la veille d’un nouveau 13 novembre 2015 ? Évaluer le niveau de risque terroriste est aussi difficile qu’indispensable pour protéger les populations civiles et mettre en place un dispositif respectant au mieux les libertés publiques.

Assurément, plusieurs facteurs sont réunis pour élever significativement le risque d’attentats en France et, plus largement en Europe. Les actions du Hamas sur le sol israélien contre des civils le 7 octobre dernier et la campagne militaire israélienne lancée en réplique, funeste pour les civils de la bande de Gaz polarisent les opinions publiques et les militants bien au-delà de la région. Le risque d’importation des violences est d’autant plus élevé que le soutien européen à la légitime défense d’Israël apparaît comme un blanc-seing au gouvernement Netanyahu. En outre, les grandes « fédérations » terroristes, rivales entre elles, sont en cours de reconstitution : après les défaites militaires en Syrie et en Afghanistan, Daech et Al-Qaida reprennent l’initiative dans des zones (Afrique occidentale, Afrique centrale) où les politiques extérieures européennes sont critiquées. Enfin, le risque de terrorisme d’extrême-droite, illustré notamment par les attentats anti-islam de Breivik en Norvège le 22 juillet 2011, n’a pas disparu. Ce risque est même proportionnel à la violence islamiste car elle se veut une protection violente de l’Occident. Plus les actes islamistes se multiplieront en Europe, plus son jumeau xénophobe ou suprémaciste se développera.

Nous prémunir contre la panique

Toutefois, plusieurs éléments permettent de tempérer ce pronostic et de nous prémunir contre la panique, tant recherchée par les organisations terroristes. D’une part, la France est structurellement exposée au terrorisme : société ouverte, internationalement très active, en point sur la défense des droits humains, elle est la cible idéale pour tous les mouvements radicaux et réactionnaires, qu’ils soient islamistes, suprémacistes ou encore anti-capitalistes. D’autre part, les organisations terroristes palestiniennes (Hamas et Jihad islamique) sont engagées depuis longtemps dans des actions violentes perpétrées en Israël contre des ressortissants israéliens. Plus encore, le Hamas a voulu, le 7 octobre, défier Israël sur le terrain militaire. Organiser des attentats terroristes en Europe serait un aveu de faiblesse au moment même où l’organisation frériste essaie de se hisser au niveau d’un para-État. Le risque d’importation indirecte, par imitation ou incitation à distance, perdure en France. Mais la situation actuelle est, pour le moment, loin d’être celle de 2015. À l’époque, de véritables chaînes de commandement internationales étaient mises en place pour organiser et superviser puis revendiquer et promouvoir des attentats en Europe depuis le Moyen-Orient. Ces attentats étaient conçus par Daech comme une réplique paneuropéenne aux actions militaires de la coalition internationale en Syrie.

En d’autres termes, en France, aujourd’hui, le risque terroriste demeure élevé, comme il l’est de façon structurelle pour une démocratie internationalement engagée. Mais, à première vue, les deux terribles assassinats, essentiellement locaux dans leur déroulement ne constituent pas les prodromes d’une nouvelle campagne jihadiste généralisée contre l’Europe à la faveur du conflit entre Israël et Hamas.

Cyrille Bret. | DR
Cyrille Bret. | DR

(*) Docteur en philosophie, expert dans les secteurs de la sécurité et de la défense, auteur de « Dix attentats qui ont changé le monde. Comprendre le terrorisme au XXIe siècle », Armand Colin,

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