Le président américain Jose Biden à Bruxelles, le 13 juin 2021

Le président américain Jose Biden, à son arrivée à Bruxelles, le 13 juin 2021.

afp.com/YVES HERMAN

Au siège de Harley-Davidson, à Milwaukee, dans le Wisconsin, on aura le regard braqué vers Bruxelles, ce mardi. La survie du fabriquant de grosses cylindrées, actuellement mal en point, dépend en partie du sommet entre les Etats-Unis et l'Union européenne (UE). Voilà trois ans en effet que l'UE impose une taxe punitive de 25% sur ses motos, plombant ses ventes dans le marché unique - une mesure de représailles à la décision américaine de taxer les importations européennes d'acier (de 25%) et d'aluminium (10%). Le mythique constructeur de motos a de bonnes raisons d'espérer une réconciliation au sommet, après les chaotiques années Trump...

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Si des signes d'apaisement ont été émis de part et d'autre, la hache de guerre commerciale n'est toujours pas enterrée. Le sujet promet d'occuper une bonne part des deux heures de réunion entre le leader américain Joe Biden, le président du Conseil Charles Michel et la patronne de la Commission Ursula von der Leyen. Coincée entre le sommet de l'Otan, lundi, et sa rencontre avec Vladimir Poutine à Genève, mercredi, cette étape n'est pas la plus spectaculaire de la tournée continentale du 46ème président américain. Elle n'en est pas moins cruciale. S'il veut obtenir que ses "amis" européens fassent front commun avec lui, face à la montée en puissance de la Chine, il doit parvenir à clore ces différends douaniers.

Pour le président démocrate, l'équation n'est pas simple. Les projets colossaux d'infrastructures prévues par son plan de relance poussent plus à maintenir les taxes décidées par son prédécesseur qu'à les lever, pour stimuler la production nationale. "De leur côté, les Européens sont à l'affut de signaux de bonne volonté, tout en restant fermes sur la mise en place d'une taxe sur les Gafam (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) et d'une taxe carbone aux frontières de l'UE, deux initiatives qui préoccupent Washington, fait valoir la chercheuse Elvire Fabry, de l'Institut Jacques Delors. Pour avancer sur ces différents dossiers, il va falloir faire des gestes de part et d'autre."

Projet de coopération sur les normes technologiques

Déjà, en mars, Washington et Bruxelles avaient annoncé qu'ils suspendaient durant quatre mois la "guerre des taxes" dans le vieux litige qui les oppose sur Airbus et Boeing. Et ils ont convenu, dans la foulée, de trouver un terrain d'entente sur l'acier et l'aluminium. Gage de bonne volonté, l'UE a renoncé, à imposer au 1er juin une nouvelle hausse des taxes punitives sur divers produits importés des Etats-Unis comme les jeans, le bourbon et les motos - Harley Davidson se serait alors retrouvé avec un total de 56% de tarifs douaniers ! Les Européens signeront-ils la pax americana ? Cela en prend le chemin. Avant la publication de la déclaration commune finale qui suit le sommet, les deux parties ont annoncé, ce mardi matin, la prolongation pour cinq ans de la suspension des taxes punitives liées au conflit sur leurs avionneurs, le temps de forger un accord définitif.

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Les partenaires devraient aussi annoncer la création d'un Conseil du commerce et de la technologie (TCC) - proposé par les Européens en décembre dernier. Cette plateforme doit, entre autres, travailler à l'élaboration des futures normes internationales sur le numérique, en particulier sur l'intelligence artificielle. "Il s'agit de limiter les abus face à une Chine qui ambitionne de plus de plus d'imposer ses propres normes, observe Elvire Fabry. Pour cela, le TCC pourrait être ouvert à d'autres partenaires." Notamment ceux qui ont participé au G7 à Carbis Bay, au Royaume-Uni.

Pékin et son influence reste un sujet épineux entre Européens et Américains. Au G7, comme à l'Otan, Joe Biden a insisté sur le fait que la Chine posait un "nouveau défi", nécessitant plus de coordination entre alliés. La façon dont les Vingt-Sept comptent y répondre pourrait cependant différer de la sienne. "L'UE veut garder une autonomie dans sa politique vis-à-vis des Chinois, constate Elvire Fabry. Elle se demande quelle pression les Etats-Unis vont mettre sur leurs partenaires..." Pas sûr que la Maison-Blanche laisse sans réponse l'ouverture d'universités chinoises sur le continent, comme le prévoit la Hongrie à Budapest ou le choix des technologies 5G de Huawei par certains pays membres de l'UE. Pour les Européens, la détente amorcée par le nouveau président américain ne signifie pas pour autant une lune de miel.

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