Publicité

Les Vingt-Sept face à la stagnation des discussions avec Londres sur l'Irlande du Nord

Les ministres des Affaires étrangères de l'UE se penchent mardi sur les relations entre Europe et Royaume-Uni, toujours empoisonnées par la question nord-irlandaise. Ils craignent de décrédibiliser leur politique commerciale s'ils se montrent trop souples avec Londres.

Le vice-président de la Commission européenne, Maroš Šefčovič, à gauche, et son interlocuteur britannique, David Frost, se rencontrent à Londres le 9 juin 2021. Ils se reverront beaucoup par la suite.
Le vice-président de la Commission européenne, Maroš Šefčovič, à gauche, et son interlocuteur britannique, David Frost, se rencontrent à Londres le 9 juin 2021. Ils se reverront beaucoup par la suite. (AFP)

Par Karl De Meyer, Ingrid Feuerstein

Publié le 22 nov. 2021 à 18:37Mis à jour le 23 nov. 2021 à 09:34

Les ministres des Affaires européennes de l'UE se réunissent, ce mardi à Bruxelles, essentiellement pour préparer le Sommet européen de décembre prochain, évaluer la situation sanitaire et mesurer l'évolution de l'inflation énergétique. Mais ils débattront aussi, une énième fois, de l'état des relations entre l'UE et le Royaume-Uni, alors que la question lancinante du protocole nord-irlandais n'est toujours pas résolue. Le vice-président de la Commission, Maroš Šefčovič, rencontrera à nouveau le ministre britannique du Brexit, David Frost, ce vendredi à Londres, pour la sixième fois depuis que les Britanniques ont rejeté ce protocole.

La Commission européenne avait pourtant fait, le mois dernier , des propositions de changements substantiels au texte. Le protocole nord-irlandais crée une frontière douanière entre l'Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni, ce qui implique de nouvelles formalités et des contrôles.

La Commission avait notamment suggéré des exemptions majeures pour assurer la livraison de médicaments vers l'Ulster. Même sur ce dossier prioritaire, aucun progrès n'a été enregistré en un mois. Côté britannique, on déplore le peu d'avancées sur les contrôles douaniers et sanitaires pour les produits alimentaires transitant de la Grande-Bretagne vers l'Irlande du Nord.

Stagnation orchestrée

Publicité

« On a une impression de stagnation orchestrée, on joue sur les mots, on se renvoie les responsabilités tout en invoquant l'urgence de la situation », analyse Elvire Fabry, chercheuse de l'Institut Jacques-Delors.

Dans une tribune publiée dans le « Daily Mail » , le ministre britannique a demandé « plus d'empressement de la part de l'Union européenne pour soutenir la paix en Irlande du Nord ». Une tonalité qui n'a visiblement pas plu à Maroš Šefčovič. « Parfois j'ai l'impression d'être le seul à vraiment pousser pour des solutions rapides », s'est-il plaint, dimanche sur la BBC.

Les Etats membres de l'UE ont tenté d'exercer une pression supplémentaire en faisant comprendre que la Commission avait déjà élaboré une panoplie de représailles au cas où Londres activerait l'article 16 qui permet aux deux parties de suspendre certains pans du protocole. Selon plusieurs capitales, il en va de la crédibilité de la politique commerciale de l'Union. Les Vingt-Sept redoutent un effet mondial de contagion s'ils laissent un de leurs importants partenaires commerciaux ne pas respecter un accord international.

Recul sur la Cour de Justice

Cette stratégie a semblé porter quelques fruits, puisque David Frost est depuis quelques semaines beaucoup plus souple sur la question de la compétence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) en Irlande du Nord. Jeudi dernier, devant la Chambre des Lords, il a reconnu que les juges de Luxembourg pourraient continuer à interpréter le droit européen dans cette région du Royaume-Uni. Sa rhétorique autour de l'article 16 a également évolué : il affirme désormais vouloir « sécuriser une solution sur la base du consensus », avant de déclencher l'arme nucléaire que constituerait la suspension du protocole.

La France, qui est en première ligne avec des sujets bilatéraux comme la pêche ou les migrations, est l'Etat membre le plus ferme. Paris ne manque pas une occasion de souligner la mauvaise foi de Londres. Selon nos informations, d'autres pays européens comme la Belgique, les Pays-Bas ou l'Irlande, appuient la volonté d'intransigeance de la France.

Lassitude

Beaucoup d'autres se sont véritablement lassés du sujet. Un des leaders du Parlement européen se lamentait récemment : « Les Britanniques sont persuadés que les Européens sont, comme eux, obsédés par le post-Brexit, alors qu'en vérité nous nous concentrons sur des sujets autrement plus importants. » On voit mal pourquoi le dossier du protocole avancerait soudain dans les semaines qui viennent. « Tout porte à croire que cette phase de temporisation est très confortable pour le Royaume-Uni, qui prolonge ainsi la période de grâce qu'il a décrétée unilatéralement. Boris Johnson tire en outre parti de cette confrontation avec les Européens en politique intérieure, c'est tout bénéfice », constate Elvire Fabry.

Ingrid Feuerstein et Karl De Meyer (Bureaux de Londres et Bruxelles)

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xx0urmq-O.jpg

SNCF : la concurrence peut-elle faire baisser les prix des billets de train ?

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

Publicité