C’est une Greta Thunberg submergée par l’émotion qui a supplié le Parlement européen d’agir pour le climat. « Sous peu, nous ne pourrons plus inverser la tendance actuelle. Lors de cette élection, vous voterez pour les futures conditions de vie de l’humanité », a lancé, en larmes, la jeune Suédoise, devenue une icône de la lutte contre le changement climatique, devant l’assemblée des eurodéputés, mi-avril. Elle n’est pas seule. A dix jours du scrutin européen, qui se tiendra du 23 au 26 mai, les appels se multiplient pour inciter l’Europe à accélérer les efforts contre le réchauffement et reprendre un leadership qu’elle a délaissé ces dernières années.
Le 7 mai, les maires de 210 villes européennes (Paris, Milan, Londres, Séville, Stockholm, Amsterdam, Athènes, etc.) ont exhorté l’UE à stopper la hausse des émissions d’ici à 2020 et à adopter un objectif de neutralité carbone pour 2050. « Les milliers de jeunes manifestant chaque semaine nous rappellent l’inadéquation de notre réponse au changement climatique », écrivent-ils dans une lettre ouverte. Ils s’inscrivent dans une large coalition paneuropéenne, regroupant des entreprises, des villes, des régions, des organisations religieuses et des ONG qui appellent à l’action.
Depuis l’été 2018, marqué par une série de catastrophes climatiques, puis la publication d’un rapport très alarmant du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) indiquant qu’il ne reste que onze ans pour inverser la tendance, une mobilisation citoyenne inédite somme les dirigeants d’agir : grèves scolaires en Belgique, en Suisse ou en Allemagne, recours en justice contre l’Etat français pour « inaction climatique », manifestations, actions coup de poing au Royaume-Uni du collectif Extinction Rebellion.
L’Europe a-t-elle abandonné la bataille pour le climat ? Malgré les critiques, le bilan est plus contrasté. « Ces cinq dernières années, l’Union européenne a été à l’origine de nombreuses avancées structurelles, avec une accélération de la décarbonation de l’économie en fin de mandature », relève Laurence Tubiana, présidente de la Fondation européenne pour le climat et ancienne ambassadrice de la France pour le climat lors de la COP21.
Bruxelles, sous l’impulsion de la France et de l’Allemagne, a d’abord joué un rôle pilote, aux côtés de Washington et de Pékin, pour parvenir à la signature de l’accord de Paris fin 2015, qui vise à maintenir l’envolée des températures sous les 2 °C, et si possible 1,5 °C. Début 2018, le Parlement a voté la réforme du marché du carbone de l’Union européenne, créé pour donner un coût dissuasif aux émissions de CO2. En novembre de la même année, les eurodéputés ont relevé les objectifs du paquet énergie (32 % d’énergies renouvelables et 32,5 % d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici à 2030). Enfin, mi-avril, ils ont voté une réduction de 37,5 % des émissions de CO2 des voitures neuves et de 30 % des rejets des camions neufs d’ici à 2030, deux avancées ayant fait l’objet d’un accord avec le Conseil européen. « L’Europe fait énormément pour le climat, même si elle pourrait faire encore plus », juge Thomas Pellerin-Carlin, chef du centre énergie de l’Institut Jacques Delors.
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