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L'Europe lance sa bataille pour le climat

La Commission européenne dévoilera mercredi son plan détaillé pour lancer le continent vers la neutralité climatique en 2050. Les transports, le bâtiment et l'énergie seront appelés à d'importants efforts d'ici à 2030. Le marché européen du carbone va être élargi et durci. Des désaccords entre Etats menacent l'ambition affichée.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, fait de ce paquet de mesures en faveur du climat la priorité de son mandat. 
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, fait de ce paquet de mesures en faveur du climat la priorité de son mandat. (Francois Walschaerts/AP/SIPA)

Par Derek Perrotte

Publié le 13 juil. 2021 à 06:30

Place aux actes. Moins d'un an après que les 27 Etats de l'Union se sont engagés à atteindre la neutralité climatique en 2050, la Commission européenne va présenter ce mardi le paquet « fit for 55 », première pierre majeure du « Green deal » dont sa présidente, Ursula von der Leyen, a fait la priorité de son mandat. Derrière ce nom de cours de fitness, se cache un vaste ensemble de douze projets de règlements et de directives devant faire système pour verdir en profondeur l'économie continentale.

Bruxelles promet un big bang écologiste, et au pas de course : l'Europe ambitionne de réduire ses émissions de CO2 de 55 % d'ici 2030 (par rapport au niveau de 1990), un objectif revu à la hausse de 15 points en décembre et qui nécessite un net changement de braquet. « On rentre dans le dur et le concret, la mise en oeuvre pratique, secteur par secteur, pays par pays, des engagements politiques », résume Lucie Mattera, du centre européen de réflexion E3G. 

Les transports y tiennent une place importante. Sous l'égide du socialiste néerlandais Frans Timmermans, son « monsieur Green deal », la Commission va encore durcir les normes d'émissions des automobiles. Son projet aboutira à la fin des ventes de voitures hybrides, essence ou diesels en 2035 ou en 2040, un calendrier très discuté. Pour accélérer l'électrification du parc, le projet impose aux Etats de déployer plus vite des bornes de recharge.

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Jusqu'ici assez épargnés, le routier et le maritime vont être rattrapés par la vague verte : le second va devoir intégrer le marché européen du carbone (ETS), et le premier, se voir imposer un système de « pollueur payeur » dédié. L'aviation, en particulier pour les vols internes à l'UE, et le bâtiment, pour y accélérer la rénovation thermique, seront aussi ciblés par cet élargissement du marché carbone.

Ce dernier, levier puissant mais aujourd'hui centré sur quelques industries lourdes et stationnaires, va aussi être durci, pour augmenter le prix de la tonne de carbone et abaisser les quotas. Autre serpent de mer auquel Bruxelles promet de s'attaquer : une refonte fiscale doit venir renforcer l'attractivité des énergies renouvelables et durcir le ton sur les énergies fossiles.

Une majorité d'Etats inquiets

Bruxelles vise une adoption du paquet en 2023 mais « d'importants désaccords entre Etats apparaissent déjà », prévient Thomas Pellerin-Carlin, de l'Institut Jacques-Delors. Poussée par l'Allemagne, l'extension du marché carbone au bâtiment inquiète une majorité d'Etats, dont la France. Ils craignent l'impact économique et social de l'effort qui pèserait sur les locataires et les propriétaires.

Une hausse du prix de l'essence fait aussi déjà craindre de voir resurgir des mouvements type « gilets jaunes ». L'ampleur de la réforme du marché carbone et de la fiscalité de l'énergie recèle également des lignes de fracture. L'Europe centrale et de l'Est craint de devoir faire face à des exigences trop élevées et trop rapides, qui casseraient la nécessaire reprise économique. Ces tensions s'ajoutent à celles déjà marquées sur la place à accorder au nucléaire et au gaz dans la transition énergétique.

La taxe carbone aux frontières divise

Un autre pilier central du plan sera très discuté : la création d'un « mécanisme d'ajustement carbone aux frontières », destiné à renchérir dans certains secteurs clés (acier, électricité, ciment, engrais, aluminium) les importations de pays tiers aux normes environnementales moins strictes. Paris veut un outil ambitieux et rapide, pour que ses revenus viennent financer le plan de relance européen ; Berlin et les pays du Nord plaident la prudence face aux risques de représailles commerciales.

Le défi sera aussi de bâtir un dispositif compatible avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce, où certains crient déjà au protectionnisme. Le résultat des élections allemandes de la rentrée, et le poids qu'y prendront les Verts, sera scruté tant il pourrait rebattre les cartes. Paris voudra profiter à plein de sa présidence tournante du Conseil de l'UE, au premier semestre 2022, pour peser sur les débats. 

Souveraineté et compétitivité

A l'approche d'une COP 26 très attendue, l'Europe s'affirme comme le premier continent à proposer une approche aussi holistique et concrète de la lutte contre le réchauffement climatique. « Elle veut renforcer un leadership mondial alimenté par quatre ans de chaise vide américaine sous Trump », met en contexte Lola Vallejo, de l'Institut du développement durable (Iddri). Objectif : faire infuser sa méthode et ses standards tout en prenant un coup d'avance.

C'est le message vendu aux entreprises : tout le monde devra participer à l'effort, il sera conséquent, mais c'est un investissement dans la compétitivité future du continent et dans sa souveraineté. A charge aux Etats d'organiser le mouvement au plus près du terrain : le plan de relance européen leur impose déjà de consacrer au moins 37 % des subventions continentales à des investissements verts.

Derek Perrotte (Bureau de Bruxelles)

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