French President President Emmanuel Macron gestures during a press conference at the Europe Day ceremony and the Future of Europe conference at the European Parliament in Strasbourg, eastern France, on May 9, 2021. (Photo by Frederick FLORIN / AFP)

Emmanuel Macron au Parlement européen, à Strasbourg, le 9 mai 2021.

AFP

Emmanuel Macron ne raffole pas des grandes conférences de presse à l'Élysée. Il avait tenu la première en avril 2019, après la crise des gilets jaunes et le grand débat national. Depuis, plus rien. Ce jeudi, le président a ouvert de nouveau grand les portes de l'Élysée aux journalistes, mais uniquement pour parler d'Europe. La France prend, le 1er janvier, la présidence tournante du Conseil européen, et Emmanuel Macron a dessiné les grandes lignes.

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Prévues à l'origine pour le 1er décembre, ces annonces avaient été reportées à la fin du mois par l'Élysée, officiellement pour ne pas empiéter sur la présidence slovène de l'UE. Finalement, elles interviennent quelques jours seulement après la fin des primaires des Républicains. "Vous ne tenez pas le même discours européen si vous avez, face à vous, Éric Ciotti ou Valérie Pécresse", souffle l'ancien diplomate Yves Bertoncini, président du Mouvement européen - France, une association en faveur de la construction européenne.

Un calendrier acrobatique pour le gouvernement

Cette présidence française de l'UE, tenue tous les six mois par un État membre différent, assure un rôle central aux questions européennes dans l'élection française. Les ministres français détermineront l'ordre du jour à Bruxelles et pousseront l'agenda européen d'Emmanuel Macron. "Comme pour chaque président sortant, l'action internationale donne de l'envergure au candidat, souligne le politologue Olivier Costa, directeur de recherche au CNRS. En ce sens, ce peut être une carte habile pour Macron, mais elle est aussi dangereuse car il va falloir concilier la campagne électorale et la présidence de l'UE, avec le vrai risque que cette dernière soit coupée en deux et paralysée à partir de fin mars."

D'ordinaire, les pays qui doivent assurer la présidence tournante de l'UE la décalent en cas d'élections. La France aurait pu le faire, mais Emmanuel Macron en a décidé autrement. "La question s'est posée il y a quatre ans de reporter ou d'avancer la présidence française du Conseil afin qu'elle ne cogne pas avec la présidentielle, reconnaît le secrétaire d'État aux Affaires européennes, Clément Beaune, auprès de L'Express. Mais le président de la République trouvait ambigu de s'annoncer comme pro-européen puis de repousser l'événement. C'est plus acrobatique pour nous, mais nous préparons cette présidence depuis le discours de la Sorbonne, en septembre 2017, et nous pouvons vous assurer que la France la mènera pendant six mois, peu importe le vainqueur de l'élection."

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Lundi soir, lors du vingt-cinquième anniversaire de l'institut Jacques Delors, le chef de l'État a décrit les trois axes de cette présidence française : "relance, puissance, appartenance". Plus concrètement, la diplomatie française travaille depuis des mois pour que les Européens se mettent d'accord sur des avancées notables, qui pourront être mises au bilan de la présidence française. Un accord sur un salaire minimum européen semble ainsi en très bonne voie, malgré les dernières réticences du Danemark. Plus délicat, la mise en place d'une taxe carbone aux frontières de l'Europe, mesure qui fait consensus en France, ne plaît pas à tous les Européens et Paris va devoir batailler sur ce dossier. L'établissement d'une défense européenne sera aussi au coeur des préoccupations de l'équipe française.

Emmanuel Macron a également profité de sa soirée européenne, lundi, pour critiquer "les nationalistes qui se nourrissent d'un révisionnisme historique", reprenant à son compte une citation d'Albert Camus : "J'aime trop mon pays pour être nationaliste". Une manière de se différencier du discours eurosceptique de certains de ses adversaires et de relancer sa stratégie de 2017. "Lors de sa campagne, Emmanuel Macron a joué la carte européenne contre l'avis de tous ses conseillers, qui ne voyaient pas une majorité de Français pro-européens, raconte le politologue Olivier Costa. Mais c'était une stratégie intelligente puisqu'au second tour il s'est retrouvé face à Marine Le Pen et sa ligne eurosceptique, apparaissant alors comme un candidat positif et confiant dans l'ouverture au monde."

Cinq ans plus tard, les Français le jugeront donc sur son action continentale. "Emmanuel Macron est un président européen, et il s'est tellement engagé sur le sujet que les Français regarderont ses résultats de près, pointe Yves Bertoncini. La présidence française de l'Union européenne lui permet, aussi, d'améliorer ce bilan."

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