Marché unique : Enrico Letta veut imiter le modèle américain de crédits d’impôt

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Dans son discours, M. Letta a souligné la faible compétitivité de l’Europe des 27 par rapport aux États-Unis, dont les performances économiques ont été supérieures à celles de l’UE ces dernières années. [Alexandros Michailidis/shutterstock]

L’ancien Premier ministre italien Enrico Letta, en charge du très attendu rapport sur le marché unique, souhaite proposer un outil ressemblant aux crédits d’impôt utilisés par la loi américaine sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act, IRA), a-t-il annoncé mardi (19 mars).

M. Letta, chargé de rédiger et de présenter un rapport de haut niveau sur l’avenir du marché unique de l’UE aux chefs d’État et de gouvernement le 17 avril, a évoqué quelques idées de ce que le rapport pourrait contenir aux chefs d’entreprise lors d’une conférence à Berlin mardi.

Dans son discours, M. Letta a souligné la faible compétitivité de l’UE par rapport aux États-Unis, dont les performances économiques ont été supérieures à celles de l’Union ces dernières années.

Pour rattraper son retard, il souhaiterait que l’Europe s’inspire de l’utilisation par les États-Unis de crédits d’impôt pour encourager les investissements nationaux tout en simplifiant les procédures administratives.

Dans le cadre de sa loi phare sur la réduction de l’inflation adoptée en 2022, le gouvernement fédéral américain a mis en place des crédits d’impôt pour promouvoir notamment le déploiement des énergies renouvelables, la production d’hydrogène et le captage et stockage du carbone (CCS).

« Serait-il possible de mettre en place quelque chose de similaire en Europe ? J’aimerais le proposer parce que je crois fermement que c’est un moyen d’être automatique, rapide et d’aller droit au but en donnant aux entrepreneurs la responsabilité de choisir leur mission, leurs cibles et leurs objectifs », a déclaré M. Letta.

Comparés aux crédits d’impôt américains, les programmes d’aide européens impliquent trop souvent de nombreuses formalités administratives, a-t-il ajouté.

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Compléter le marché unique

Enrico Letta a également souligné la nécessité de mettre en place une politique industrielle commune au niveau de l’UE, au lieu des 27 politiques individuelles, car on craint de plus en plus que l’utilisation de subventions publiques au niveau national n’accentue les divergences au sein du marché unique.

« La politique industrielle nationale ne suffit pas », a-t-il déclaré, soulignant la nécessité d’utiliser la dimension du marché unique de l’UE pour se maintenir au niveau des États-Unis, notamment en ce qui concerne les dépenses en recherche et innovation.

M. Letta a également réitéré son appel à l’UE pour qu’elle finalise les secteurs qui ont été intentionnellement laissés de côté — pour des raisons géopolitiques, a-t-il dit — lors de la création du marché unique en 1993.

À l’époque — et en partie encore aujourd’hui — l’intégration des marchés de l’énergie, des télécommunications et des finances posait des problèmes plus complexes que dans d’autres domaines.

Cela était dû à de nombreux facteurs critiques hérités du passé, y compris, concernant l’énergie et les télécommunications, le fait que de nombreuses entreprises nationales étaient largement détenues par l’État, tandis que les réseaux physiques, ainsi que les accords commerciaux sectoriels, nécessitaient des négociations et des processus complexes pour pouvoir être modifiés de manière substantielle.

« Ce n’est pas un hasard si nous avons un système très fragmenté dans [ces] trois domaines — télécommunications, énergie et finances », a déclaré M. Letta. « Je plaiderai donc fermement en faveur d’une consolidation de ces marchés. Je pense que c’est essentiel ».

« Il n’y a pas de politique industrielle sans énergie, […] connectivité, et […] finance. Ces trois éléments sont les conditions préalables à une politique industrielle européenne forte et efficace. »

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L’Union des marchés des capitaux n’est pas « sexy », mais nécessaire

Alors que pour le secteur financier, cela inclut l’intégration des marchés des capitaux, M. Letta a déclaré qu’il n’aimait pas le terme d’Union des marchés des capitaux (UMC) et qu’il «essaierait d’en proposer un autre ».

« [Le terme] Union des marchés des capitaux n’est pas très sexy, et je pense que nous devons donner une nouvelle image à ce sujet », a-t-il déclaré, soulignant que l’objectif principal serait de lever des fonds pour des idées et des innovations plus risquées.

M. Letta a fait remarquer qu’à l’heure actuelle, de nombreuses entreprises innovantes quittent l’Europe pour trouver des capitaux ailleurs.

C’est ce que souligne également un rapport publié mercredi (20 mars) par l’Association des marchés financiers en Europe (Association for Financial Markets in Europe, AFME).

Le rapport se concentre sur l’Allemagne et cite les fabricants allemands de vaccins Biontech et Curevac comme exemples éloquents de grandes entreprises nationales qui ont choisi l’entreprise américaine NASDAQ pour leur cotation en bourse plutôt qu’une bourse allemande, en raison d’un environnement plus favorable pour les investisseurs.

Selon le rapport, les entreprises allemandes cotées à l’étranger ont non seulement connu une croissance plus rapide que celles cotées en Allemagne (avec une hausse du chiffre d’affaires de +159 % contre +77 % au cours des trois premières années suivant la cotation), mais elles ont également déplacé une plus grande partie de leurs activités commerciales en dehors du pays.

Cette situation « a des effets négatifs sur l’économie allemande » et entrave son potentiel de croissance, selon l’AFME, qui a mis en garde contre des problèmes similaires dans d’autres États membres de l’UE.

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[Édité par Anna Martino]

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