Qui dit « big bang » législatif dit explosion de réactions. La présentation par la Commission européenne, mercredi 14 juillet, d’une douzaine de propositions législatives pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne (UE) a suscité un accueil partagé de la part du personnel politique, des ONG et des entreprises. Si la plupart des acteurs reconnaissent l’ambition globale des mesures, ils font aussi part de leurs revendications, alors que s’ouvre une phase de négociations avec le Conseil et le Parlement, qui devraient faire évoluer les textes initiaux.
« Avec ce paquet très cohérent, on entre enfin dans le dur du pacte vert européen qui vise à accélérer la transition écologique et industrielle », se félicite Thomas Pellerin-Carlin, directeur du centre énergie de l’Institut Jacques-Delors. « Si ce paquet législatif était adopté en l’état, il mettrait l’Union européenne sur la voie de son objectif pour 2030 », ajoute l’expert. Les Vingt-Sept se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % à l’horizon 2030 par rapport à 1990, afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.
Droits à polluer
« Tous les chantiers sont ouverts pour parvenir à notre objectif. Il n’y a pas d’impasse sur un secteur. Même l’aviation et le maritime, qui étaient jusqu’à présent un angle mort, sont désormais mis à contribution », ajoute Neil Makaroff. Le responsable des politiques européennes de la coalition d’ONG françaises Réseau Action Climat appelle toutefois à « relever le niveau d’ambition ». Pour le Climate Action Network, qui rassemble plus de 1 300 ONG à l’échelle mondiale, l’Union européenne devrait viser une réduction des émissions d’« au moins 65 % » en 2030, afin de faire sa part pour limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 °C, l’objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris. « Célébrer ce paquet législatif, c’est comme si un athlète de saut en hauteur réclamait une médaille pour être passé sous la barre », ironise, de son côté, le directeur européen de Greenpeace, Jorgo Riss, qui dénonce que de « nombreuses politiques n’entreront pas en vigueur avant dix ans ou plus ».
La mesure la plus controversée du paquet réside dans la proposition de création d’un second marché carbone pour le transport routier et le chauffage des bâtiments à partir de 2026. En pratique, cela reviendrait à imposer aux fournisseurs de carburants, de gaz ou de fioul d’acheter des droits à polluer, un surcoût qu’ils répercuteraient sur la facture des ménages. Ce coût additionnel pourrait s’élever à plus de 400 euros par an en moyenne sur la période 2025-2040, dans l’hypothèse d’un prix modéré du carbone, selon les calculs de l’ONG bruxelloise European Roundtable on Climate Change and Sustainable Transition. « Le prix très volatil du CO2 risque de toucher de plein fouet les ménages, en particulier les plus modestes », s’inquiète Neil Makaroff, qui craint un mécanisme à même de faire « dérailler le pacte vert ». Le fonds social pour le climat, qui doit être créé pour aider les plus vulnérables à amortir le nouveau marché carbone, est « totalement insuffisant », juge-t-il, alors qu’il serait doté de 72 milliards d’euros sur sept ans, à partager entre les Vingt-Sept.
Il vous reste 45.17% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.