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Plan de relance européen : la course contre la montre

Alors que les Ving-Sept Etats de l'Union européenne affrontent une récession historique, le plan de relance ne sera opérationnel qu'à la fin du premier trimestre 2021, au mieux. D'ici là, des prêts sont toutefois accessibles. Et les Etats vont multiplier les mesures nationales.

Les pays membres de l'Union européenne, dont les drapeaux flottent ici à Bruxelles, vont devoir faire ratifier le plan de relance des Vingt-Sept par leurs parlements.
Les pays membres de l'Union européenne, dont les drapeaux flottent ici à Bruxelles, vont devoir faire ratifier le plan de relance des Vingt-Sept par leurs parlements. (Frederic MAIGROT/REA)

Par Derek Perrotte

Publié le 3 août 2020 à 07:35Mis à jour le 3 août 2020 à 08:19

Une chute de 10,1 % en Allemagne , de 13,8 % en France , de 18,5 % en Espagne ou encore de 12,4 % en Italie : les premières estimations de la croissance au deuxième trimestre dans les Etats de l'UE soulignent la violence historique de la crise économique qui découle de la crise sanitaire. Selon Eurostat, le plongeon a ainsi atteint 12,4 % dans la zone euro d'avril à juin sous l'effet des confinements.

La réponse continentale est désormais connue, avec un plan de relance, lui aussi historique, de 390 milliards d'euros de subventions et 360 milliards d'euros de prêts, adopté le 21 juillet sous l'impulsion de Paris et Berlin et au terme de très âpres négociations entre les Vingt-Sept.

N'en déplaisent à ses opposants, comme le RN en France, un tel effort de solidarité continentale est bien indispensable pour relancer des économies européennes profondément interconnectées. Il est difficile d'imaginer par exemple l'Espagne et l'Italie, les troisième et quatrième économies de l'Union, particulièrement frappées et aux finances publiques déjà fragiles, arriver à produire l'effort de relance nécessaire sans les quelque 60 et 70 milliards d'euros (respectivement) dont ils devraient bénéficier via ce plan.

Défi technique

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Si le soulagement était ainsi palpable quand la fumée blanche est sortie du sommet européen, de nombreux obstacles restent à franchir dans ce qui constitue désormais pour l'Europe une course contre la montre.

Pour pouvoir concrètement commencer à lever l'emprunt devant financer le plan dès le 1er janvier prochain, son objectif affiché, la Commission européenne a d'abord besoin que le plan soit validé par les Parlements nationaux des Etats membres. En théorie, les gouvernements des Vingt-Sept y ont préparé le terrain, et aucun Etat ne connaîtra d'ici là d'élections à même d'y modifier la donne politique.

Mais le pataquès provoqué en 2016 par le rejet de l'accord commercial CETA par le Parlement wallon , en Belgique, rappelle qu'un accident ou un contretemps est vite arrivé. « Il suffit d'un pays pour bloquer et le délai est très court d'ici Noël », rappelle Sébastien Maillard, directeur de l'Institut Jacques Delors. Pour cause, par le jeu du bicamérisme et des parlements régionaux dans certains Etats, ce ne sont pas moins de 39 chambres qui devront valider l'accord, a recensé l'Institut. Or, historiquement, une telle ratification générale d'un accord européen n'a jamais mis moins de 13 mois…

Monstre bureaucratique

La machine bruxelloise est aussi mise au défi de suivre la cadence. Elle qui emprunte traditionnellement quelque 6 milliards d'euros par an va devoir orchestrer en un temps record une levée d'une tout autre ampleur. « Elle va devoir gérer subitement l'équivalent de cinq fois le budget annuel européen. Son défi sera d'éviter que le traitement des demandes de subventions et leur décaissement ne se transforment en monstre bureaucratique, tout en prévenant les risques de gaspillage et de détournement qui augmentent avec les nouveaux volumes à gérer », poursuit Sébastien Maillard.

Arme politique

Charge, en outre, aux Etats de présenter des plans nationaux de relance respectant les critères fixés pour bénéficier des subventions européennes, comme l'obligation de consacrer au moins 30 % de ces dernières au verdissement de l'économie, un exercice dont il ne faut pas sous-estimer la complexité. S'ajoute enfin un dernier obstacle potentiel : lors des négociations, les Pays-Bas ont obtenu un dispositif permettant à un Etat membre de demander la validation d'un plan de relance national d'un des 27 par une majorité de ses pairs au Conseil, en plus de son étude par la Commission européenne (elle s'engage à étudier les plans en deux mois maximum). « C'est une arme politique lourde, qui est plus destinée à rassurer l'opinion néerlandaise qu'à être déclenchée le moment venu, mais sait-on jamais… », analyse une source européenne.

Des prêts en attendant

Dans ce contexte, les premiers décaissements de subventions européennes ne devraient pas intervenir, au mieux, avant la fin du premier trimestre 2021. L'Europe dispose toutefois toujours des trois instruments de soutien aux Etats membres bâtis en urgence au printemps, le fonds de soutien aux PME de la Banque européenne d'investissement (BEI), le fonds lancé dans le cadre du mécanisme européen de stabilité et le dispositif SURE de soutien au chômage partiel, pour un total de 540 milliards d'euros. Mais il s'agit ici de prêts, non de subventions.

En attendant, les Etats vont continuer de dégainer des mesures au niveau national. La France détaillera ainsi un plan de relance à 100 milliards d'euros (sur 2021-2022) fin août, l'Allemagne ayant déjà agi début juillet (baisse de la TVA, notamment). Mais l'Espagne et l'Italie auront vite besoin du relais européen.

Derek Perrotte (Bureau de Bruxelles)

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