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POINT DE VUE. « Pologne, la puissance européenne de 2025 ? »

Varsovie sera-t-elle le nouveau centre de gravité politique de l’Europe alors que son Premier ministre, Donald Tusk, préside le conseil de l’Union européenne pour les six premiers mois de l’année ? L’analyse de Cyrille Bret, chercheur associé à l’Institut Jacques Delors.

Le Premier ministre polonais Donald Tusk préside le conseil de l’Union européenne pour les 6 premiers mois de l’année 2025.
Le Premier ministre polonais Donald Tusk préside le conseil de l’Union européenne pour les 6 premiers mois de l’année 2025. | ALEKSANDER KALKA /NURPHOTO VIA AFP
  • Le Premier ministre polonais Donald Tusk préside le conseil de l’Union européenne pour les 6 premiers mois de l’année 2025.
    Le Premier ministre polonais Donald Tusk préside le conseil de l’Union européenne pour les 6 premiers mois de l’année 2025. | ALEKSANDER KALKA /NURPHOTO VIA AFP

« Les avis de tempêtes s’accumulent dans le ciel européen, notamment en provenance d’Amérique, et le Premier ministre polonais Donald Tusk est à la barre du conseil de l’UE pour les six prochains mois. Fin manœuvrier et disposant d’atouts indéniables, fédérera-t-il l’équipage européen pour l’emmener vers une « Europe polonaise » ?

Le pays dispose de nombreux atouts pour façonner la scène politique européenne. Le retour au pouvoir de Donald Tusk, en 2023, a tourné la page de l’euroscepticisme des gouvernements du parti Droit et Justice (PiS) et consacré la Pologne comme un notable sur le continent. Depuis les élections européennes de juin 2024, Pologne et institutions européennes sont alignées : Donald Tusk est un des leaders du Parti Populaire Européen (PPE), majoritaire au Parlement et dominant à la Commission avec la présidente de la Commission. Ancien président du Conseil européen durant la précédente mandature européenne (2014-2019), il est tout à la fois un poids lourd, un vétéran et un chef de file de la politique européenne.

La vision polonaise pour l’Union européenne est renforcée par la solidité de son économie aux indicateurs macro-économiques favorables : taux de croissance du PIB importants (+ 3 % en 2024), taux de chômage bas (2,9 % en 2024), dette publique limitée à 54,7 % du PIB. Cela a permis au pays de développer un « effort de défense » qui a crû de plus de 75 % entre 2022 et aujourd’hui.

Une Europe à l’image de la Pologne, industrielle, rigoureuse budgétairement et prête à payer pour sa défense, voilà ce que le chef du gouvernement polonais promeut.

Un chef de file vulnérable

Bénéficiant des difficultés politiques intérieures de la France et de l’Allemagne, l’influence de la Pologne en Europe présente quelques fragilités. À court terme, la prise de fonction de Donald Trump, le 20 janvier, risque de réactiver les réseaux et les réflexes transatlantiques à Varsovie : déplaire à Washington est un risque que peu de dirigeants polonais veulent prendre. Quant à l’autre Donald (Trump), il privilégie Giorgia Meloni et Viktor Orban.

Faut-il augmenter la part du PIB français dédiée à la défense à 4%, à l’image de la Pologne ?

Facteur aggravant, la Pologne ne bénéficie plus de ses réseaux traditionnels en Europe : le « Triangle de Weimar » par lequel Pologne, Allemagne et France ont fait entendre leur voix sur la sécurité européenne pâtit des difficultés et dissensus des exécutifs Macron et Scholz. Quant au « groupe de Visegrad ou V4 » qui servait de groupe de pression interne à l’UE au profit de ses membres (Pologne, Tchéquie, Slovaquie, Hongrie), il est aujourd’hui inopérant du fait de sa scission concernant les rapports avec la Russie des Premiers ministres russophiles (Fico en Slovaquie, Orban en Hongrie) et une Pologne en pointe sur la stratégie des sanctions. Enfin, la Pologne n’est ni membre du club puissant de l’euro ni exemplaire en matière d’acquisition d’armements européens (elle préfère les missiles américains et les chars coréens).

Exemplaire mais peu fédératrice, la Pologne risque d’être rapidement prise entre son rôle de meilleur allié des États-Unis et son statut d’avocat de l’Ukraine en Europe. La relation avec la nouvelle administration américaine déterminera le succès ou l’échec de la présidence Tusk. »

Cyrille Bret | DR
Cyrille Bret | DR

(*) Chercheur associé à l’Institut Jacques Delors et enseignant à Sciences Po. Auteur de « Dix attentats qui ont changé le monde. » Dunod.

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