À quoi ressemblera un début de présidence de l’Union en pleine déferlante Omicron sur la France ? « Je ne parlerais plus de vague, s’agissant d’Omicron, j’aurais tendance à parler de raz-de-marée », a déploré mercredi 29 décembre Olivier Véran. Le ministre de la santé a estimé à plus d’un million le nombre de Français touchés au même moment par le Covid-19, après que 208 000 cas positifs ont été enregistrés en 24 heures. Un nouveau record.

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Omicron risque ainsi de perturber les plans de la présidence française. Alors qu’Emmanuel Macron a présenté, le 9 décembre dernier, un programme plus qu’ambitieux, il se retrouve face à un double obstacle. Déjà, il n’avait que trois mois pour faire aboutir la multitude de ses projets de réforme, avant que la campagne présidentielle ne vienne tout geler dès la fin mars.

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Mais l’épidémie risque de reléguer la présidence française de l’Union européenne (PFUE) à l’arrière-plan médiatique – sans parler de l’intérêt de l’opinion. Le président de la République sera en outre accaparé par la situation française au moment où il entendait s’élever au niveau européen pour surplomber les débats nationaux, dans la perspective de sa propre candidature.

« Un programme pensé pour l’après-Covid »

« La présidence tournante est toujours tributaire des événements. En 2008, Nicolas Sarkozy avait eu la crise économique. Emmanuel Macron aura Omicron », constate Sébastien Maillard, directeur de l’Institut Jacques-Delors. Il souligne, difficulté supplémentaire, que « le programme de la PFUE a été pensé pour un contexte d’après-Covid ».

En témoigne la multitude d’événements prévus au cours du premier trimestre, avec 18 réunions de ministres européens dans différentes villes de France. Alors que les États membres n’ont jamais marché du même pas en matière de restrictions sanitaires, « la pandémie risque de réintroduire de la viscosité aux frontières, peut-être des fermetures sauvages, et compliquer les réunions », conjecture un député de la majorité.

« Je suis plutôt optimiste car les Européens, dans leur majorité, sont correctement vaccinés. Mais oui, il y a un risque que cette crise gêne un certain nombre d’événements internationaux, confirme l’eurodéputée LREM Véronique Trillet-Lenoir. La France a une politique sanitaire particulièrement équilibrée, mais cette ligne n’est pas forcément très suivie dans l’ensemble des pays européens, qui ont parfois tendance à naviguer entre confinements durs et laxisme complet. »

« La PFUE se déroulera quoi qu’il arrive »

Du côté des organisateurs, on assure que tout est prévu. « Nous avons évidemment travaillé sur l’hypothèse d’un rebond de la crise », affirme-t-on au secrétariat général de la PFUE, où l’on dit bénéficier de l’expérience des trois dernières présidences qui se sont déroulées pendant la crise.

« La présidence française n’a pas encore commencé, et avec le Covid, la situation ne s’évalue pas à plus de deux semaines, tempère aussi l’entourage du président. La PFUE, ce sont certes des événements avec du public, mais aussi beaucoup de réunions ministérielles en plus petit comité. Elle se déroulera quoi qu’il arrive, et les bonnes discussions auront lieu. »

Sans compter qu’Emmanuel Macron, qui se félicite régulièrement que la pandémie ait permis de construire à grande vitesse une « Europe de la santé », pourrait aussi tirer bénéfice d’un leadership européen en période de crise.

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Ses partisans sont partagés. Pour les uns, l’uniforme de « capitaine dans la tempête » est un atout. Pour les autres, il n’est pas bon d’apparaître en gestionnaire d’une crise dont les Français sont plus que lassés. Dans tous les cas, les hautes ambitions affichées ces dernières semaines risquent d’en pâtir. « De toute façon, il a eu tort d’en faire autant, râle un député de la majorité. C’est une machine à décevoir. »