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Prix de l'électricité : Macron veut que l'Europe mette à contribution les énergéticiens

A l'instar de son homologue allemand, le président français a défendu lundi un prélèvement sur les « bénéfices indus » des producteurs d'énergie, liés à la flambée des cours de l'électricité. Cette contribution serait instaurée en France même si l'Union européenne ne la décidait pas pour l'ensemble des Etats membres.

Le chef de l'Etat a évoqué « des bénéfices indus » dégagés par certaines entreprises du secteur de l'énergie. Il s'exprimait lors d'une conférence de presse à l'Elysée, à l'issue d'un entretien en visioconférence avec le chancelier allemand Olaf Scholz.
Le chef de l'Etat a évoqué « des bénéfices indus » dégagés par certaines entreprises du secteur de l'énergie. Il s'exprimait lors d'une conférence de presse à l'Elysée, à l'issue d'un entretien en visioconférence avec le chancelier allemand Olaf Scholz. (Ludovic Marin/Pool via REUTERS)

Par Vincent Collen, Karl De Meyer

Publié le 5 sept. 2022 à 19:15Mis à jour le 5 sept. 2022 à 22:22

La France est favorable à une contribution exceptionnelle des énergéticiens pour faire face à la crise inflationniste qui menace l'économie tricolore et européenne. Emmanuel Macron a défendu lundi le principe d'un « mécanisme de contribution européenne », un prélèvement sur les opérateurs énergétiques « dont les coûts de production sont très inférieurs aux prix de vente sur le marché ».

Le chef de l'Etat a évoqué « des bénéfices indus » dégagés par certaines entreprises du secteur. Il s'exprimait lors d'une conférence de presse à l'issue d'un entretien en visioconférence avec le chancelier allemand Olaf Scholz.

Flambée inouïe des cours

Paris comme Berlin souhaitent que cette contribution soit mise en oeuvre « au niveau européen », et qu'elle soit ensuite reversée aux Etats-membres, a-t-il précisé. Le produit de ce prélèvement pourrait être utilisé par les différents pays pour financer des mesures telles que le blocage des tarifs. Si les Vingt-Sept ne parvenaient pas à se mettre d'accord sur ce sujet, le prélèvement exceptionnel serait instauré quoi qu'il en soit « au niveau national », a prévenu Emmanuel Macron.

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L'Allemagne a d'ores et déjà annoncé, ce week-end, qu'elle instaurerait une telle contribution . Emmanuel Macron n'a pas dit quelles entreprises seraient visées, mais on connaît en tout cas le principe qui serait appliqué. Il s'agirait des entreprises qui produisent de l'électricité dans des centrales nucléaires, au charbon, ou encore à partir de sources renouvelables (éolien, solaire, hydraulique…). Elles bénéficient de la flambée inouïe des cours de l'électricité , entraînés dans le sillage du gaz, alors que leurs coûts n'ont pas augmenté depuis la crise, en tout cas pas autant que ceux des centrales à gaz.

Prix plafond pour le gaz russe

Défendant une position commune avec l'Allemagne, Emmanuel Macron s'est également dit favorable à ce que les Vingt-Sept puissent acheter leur gaz en commun, ce qui permettrait selon lui de « payer moins cher ». La France soutiendra aussi le principe d'un prix plafond sur le gaz russe si la Commission européenne y est favorable. Une mesure politiquement forte, mais qui a perdu de sa puissance potentielle vu l'effondrement des livraisons de Gazprom . Le chef de l'Etat a souligné lui-même lundi que la Russie ne représentait plus que « 9 % » des achats gaziers de l'Union, contre 50 % avant la guerre.

Enfin le président défend des mesures pour « réduire la volatilité » des prix du gaz et de l'électricité sur les marchés de gros, stimulée selon lui par des « pratiques spéculatives ». Il s'inquiète notamment de l'envolée des contreparties financières qui servent de garantie aux transactions .

Ce week-end, la Suède et la Finlande ont dû voler au secours de leurs énergéticiens pour éviter des faillites en cascade. L'Allemagne a renfloué Uniper dont la fragilité financière menaçait de provoquer, par effet domino, un « Lehman Brothers de l'énergie » sur les marchés. Il y a « au moins un accord franco-allemand » sur ce sujet, selon Emmanuel Macron, qui souhaite toutefois que le contrôle de ces mesures de lutte contre la volatilité et la spéculation se fasse « au niveau européen ».

Système de fixation des prix

L'Europe multiplie elle aussi les propositions qui seront examinées à Bruxelles vendredi, lors d'une réunion des ministres de l'Energie. Dans une note de cadrage en date du 4 septembre, qui a « fuité », la présidence tchèque de l'UE liste une série d'actions.

Parmi les actions proposées figure un plafonnement du prix du gaz et de certaines productions électriques, les moins coûteuses (renouvelables, nucléaire, etc.). Autre piste : l'exclusion du système de fixation des prix (le « merit order », en anglais) des centrales électriques fonctionnant au gaz. Ce sont elles qui, jusqu'ici, font grimper le prix de l'électricité. A cela pourrait s'ajouter la réduction coordonnée de la demande d'électricité, après que les Vingt-Sept se sont mis d'accord en juillet sur une réduction de la consommation de gaz . Les ministres vont enfin examiner le principe de la contribution des énergéticiens défendue par Emmanuel Macron et Olaf Scholz.

« Concours Lépine »

Selon Thomas Pellerin-Carlin, directeur du Centre énergie de l'Institut Jacques Delors, « cette contribution peut se comprendre dans le contexte allemand, mais pas dans un pays comme la France. Les profits du nucléaire vont déjà largement dans les caisses de l'Etat, qui détient EDF, et les renouvelables reversent aussi à l'Etat une large part de leurs profits lorsque le prix de l'électricité est élevé ».

Cet expert se dit perplexe face « au concours Lépine de propositions auquel semblent se livrer certains politiques ». Selon lui, « on s'intéresse beaucoup à l'offre d'électricité, mais trop peu à la demande. Les efforts consentis par toute la société et l'industrie japonaises après l'accident de Fukushima montrent qu'on peut réduire très fortement la consommation en mobilisant la population et les entreprises ».

Le précédent du Texas

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Thomas Pellerin-Carlin souligne aussi l'importance, si l'on veut modifier en profondeur le mécanisme de fixation des prix de l'électricité, comme la Commission en a l'intention, de « bien prendre le temps d'étudier le sujet sous toutes les coutures, sous peine de se retrouver dans des situations de crise comme au Texas en 2021, où les opérateurs n'avaient pas reçu les bonnes incitations ». Voilà pourquoi en attendant une telle refonte, de fait complexe, Paris et Berlin avancent leur proposition de contribution exceptionnelle.

VIDEO. Emmanuel Macron demande aux Français d'économiser 10% de l'énergie qu'ils consomment

Karl De Meyer

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