Voilà le contact rétabli, alors qu’il n’y avait plus eu de sommet UE-États-Unis depuis 2017. Invité depuis son élection, Joe Biden était attendu au tournant, mardi 15 juin, à l’occasion de sa rencontre avec les deux dirigeants européens, le président du Conseil Charles Michel et la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.

Enterrer la hache de Trump

Le président américain leur a répondu par un symbole fort. Une trêve de cinq ans a été actée pour régler le vieux conflit Airbus-Boeing qui empoisonne les relations sur fond de subventions illégales accordées aux avionneurs. Il s’agit d’une « étape importante » pour l’UE qui avait fait le premier pas en suspendant dès le 1er juin les taxes (­Harley-Davidson, jeans, tabac, maïs, riz, jus d’orange…) instaurées en riposte aux taxes américaines. Ces contre-mesures resteront gelées six mois, pour donner à Washington le temps de lever à son tour les barrières tarifaires imposées sous l’ère Trump sur l’acier, l’aluminium, ou encore sur le secteur viticole. Cet agenda doit montrer à Moscou et Pékin un front occidental soudé.

Dans leurs conclusions, Bruxelles et Washington se disent « prêts à répondre fermement à la répétition de comportements négatifs et d’activités nocives » de la Russie. Les Occidentaux se sont également promis de « coopérer étroitement » face à la Chine, mais dans le respect de « leurs approches respectives ». L’UE, inquiète du sort des Ouïghours et de la situation à Hong Kong, a suspendu l’accord sur les investissements noué en décembre avec Pékin, mais n’y a pas renoncé.

Pragmatisme à l’honneur

Les États-Unis et l’Union européenne n’entendent pas entrer dans une logique d’accord de libre-échange. Gelé jusqu’à nouvel ordre, le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP) négocié depuis 2013 n’est plus d’actualité. Bruxelles et Washington optent plutôt pour un « Conseil de commerce et de technologie » dont le but sera de promouvoir des normes communes dans des domaines tels que l’Intelligence artificielle, le numérique, dans le but de limiter les usages excessifs observés dans les régimes autocratiques.

La convergence est également attendue en matière fiscale (taxation minimum des multinationales) ou dans le domaine environnemental (prix de la tonne de CO2). « Cette logique de coopération réglementaire est ambitieuse, elle sera peut-être plus efficace qu’une approche qui passe par un menu très large, mais sur lequel il est très difficile de s’entendre », souligne Elvire Fabry, experte en politique commerciale à l’Institut Jacques Delors.

Les tractations vont bon train, avant les élections nationales en Allemagne, puis en France. « Il existe un niveau d’échange élevé avec les Américains », note Xavier Timbeau, directeur de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). En témoigne la présence au côté de Joe Biden de sa représentante au commerce des États-Unis, Katherine Tai. À 47 ans, cette fille d’immigrés taïwanais, diplômée de Yale et de Harvard, qui parle couramment le mandarin, assurait des discussions parallèles lors de ce sommet, avec le vice-président exécutif de la Commission européenne, le Letton Valdis Dombrovskis. Objectif, contrer la Chine.