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Union européenne : qu'est-ce que la protection temporaire accordée aux Ukrainiens ?
L'UE a adopté le dispositif de protection temporaire pour les ressortissants Ukrainiens.
Maksym Toussaint / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Union européenne : qu'est-ce que la protection temporaire accordée aux Ukrainiens ?

Réfugiés

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Ce jeudi 3 mars, les ministres européens de l'Intérieur ont adopté un système dit de protection temporaire pour les ressortissants ukrainiens. Une mesure, distincte de l'asile, qui permet d'accueillir les réfugiés. Marianne fait le point.

Un million. C'est le nombre d'Ukrainiens qui, selon le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés Filippo Grandi, ont déjà fui leur pays à la suite de l'invasion militaire russe lancée ce jeudi 24 février. Alors que les forces de Poutine poursuivent leur offensive, ce chiffre pourrait encore grimper dans les semaines à venir.

Afin de faire face à cet afflux massif, les ministres européens de l’Intérieur se sont réunis, ce jeudi 3 mars, à Bruxelles. Ils ont convenu de la mise en place d'une « protection temporaire », accordés aux Ukrainiens qui fuient le conflit et aux immigrés en situation régulière dans le pays. Mais de quoi parle-t-on ?

Qu'est-ce que la protection temporaire ?

La protection temporaire découle d'une directive européenne adoptée le 20 juillet 2001. Il revient au Conseil de l'Union européenne de l'autoriser. Elle est définie comme un « dispositif exceptionnel et temporaire ». « Cette protection est accordée à un groupe, dans son ensemble, qui fuit un conflit », explique Yves Pascouau, spécialiste des migrations et chercheur associé senior à l'institut Jacques Delors. « L'objectif est d'éviter l'engorgement des systèmes d'asile alors que l'on sait d'office que ces personnes répondront aux critères de protection. »

Depuis sa création, la directive n'a jamais été appliquée. À l'époque, il s’agissait d'une réaction à la guerre en Yougoslavie, en Bosnie et au Kosovo, dans les années 90, qui ont provoqué un afflux massif de réfugiés aux portes de l'Europe. « Les pays de l'ouest disposaient déjà d'une telle protection mais l'idée était d’harmoniser, à l’échelle européenne, un dispositif commun au cas où de nouvelles crises se produisent », poursuit Ekrame Boubtane, économiste et spécialiste des questions liées aux migrations internationales.

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Concrètement, un Ukrainien qui rallie un pays européen pourra bénéficier d'un titre de séjour d'un an, renouvelable deux années de plus, ainsi que d'une autorisation de travail. Il aura également accès aux systèmes de santé, d'éducation et pourra percevoir une allocation financière pour l'aider à se loger et subvenir à ses besoins. La spécialiste explique que la protection temporaire « précise les conditions minimums d'accueil mais chaque pays a le droit de faire mieux, en fonction des dispositifs spécifiques dont ils disposent ».

En quoi c'est différent du droit d'asile ?

La différence majeure entre ce dispositif européen et le statut de réfugié réside dans la démarche administrative. Sans protection temporaire accordée à un groupe humain défini, une personne qui fuit la guerre, à l’image des Syriens en 2011, doit faire une demande d'asile en préfecture. Lorsqu'il obtient une confirmation de l’enregistrement de sa demande, il recevra une attestation de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) d'un mois, renouvelable.

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Le temps que l'administration publique décide s'il relève, ou non, de l'asile, le réfugié bénéficie du droit au maintien sur le territoire. À ce titre, il peut être hébergé dans des centres d'accueils spécifiques, recevoir l'allocation pour demandeur d'asile (Ada) et un accès aux soins. En revanche, pour une durée de 6 mois, il n'a pas le droit de travailler.

Si l'OFPRA accepte la demande d'asile, deux dispositifs distincts peuvent être appliqués, mais quels qu'ils soient, les mêmes droits sociaux s'appliquent. La distinction réside dans la durée de séjour. « Le plus favorable en matière d’intégration à long terme est celui de réfugié », estime la spécialiste des questions liées aux migrations internationales. Il est accordé aux personnes persécutées dans leur pays sur le fondement de leur identité ou leurs actions pour la liberté. La définition est issue de la Convention de Genève de 1951. Un réfugié obtient une carte de résident pour 10 ans, avec un accès au marché du travail. « Les réfugiés ont vocation à devenir des immigrés permanents », glisse Ekrame Boubtane.

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Ceux qui ne relèvent pas du statut de réfugié mais font face à un risque de peine de mort, de torture ou de menace liée à un conflit armé, peuvent obtenir une protection subsidiaire. Ils recevront une carte de séjour d'une durée de 4 ans. « Leur situation est moins pérenne, précise l'économiste. Une fois ce laps de temps écoulé, si la situation au pays d’origine s'est améliorée la personne peut être invitée, ou forcée, à y retourner. Dans le cas inverse, elle peut demander une nouvelle carte de séjour. »

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne