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POINT DE VUE. Viktor Orbán, central à l’internationale, marginal en Europe ?

Quel bilan tirer de la présidence semestrielle du Conseil de l’Union européenne, assurée depuis juillet dernier par le Premier ministre hongrois Viktor Orbán ? Pour le chercheur Cyrille Bret, les résultats obtenus pour l’Europe sont inversement proportionnels aux initiatives tonitruantes prises sur la scène internationale.

Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán en compagnie de Donald Trump, alors en campagne, le 11 juillet dernier à Mar-a-Lago (Floride, USA).
Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán en compagnie de Donald Trump, alors en campagne, le 11 juillet dernier à Mar-a-Lago (Floride, USA). | EPEFE/ZOLTAN FISCHER
  • Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán en compagnie de Donald Trump, alors en campagne, le 11 juillet dernier à Mar-a-Lago (Floride, USA).
    Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán en compagnie de Donald Trump, alors en campagne, le 11 juillet dernier à Mar-a-Lago (Floride, USA). | EPEFE/ZOLTAN FISCHER

« Pour la présidence semestrielle du Conseil de l’UE assumée depuis le 1er juillet par la Hongrie, l’heure du bilan a sonné. S’il est particulièrement maigre sur la scène communautaire, il est tonitruant sur la scène internationale. Le Premier ministre Viktor Orbán a fait de cette présidence une caisse de résonance inespérée pour son pays, pour son agenda politique et pour lui-même. Mais sera-t-il en mesure de peser durablement sur l’action de l’Union européenne une fois la présidence polonaise commencée le 1er janvier 2025, sous la houlette du libéral Donald Tusk ?

Avec la Fédération de Russie, Viktor Orbán a tiré parti de cette « présidence européenne » : il s’est immédiatement donné à lui-même le rôle du médiateur par une visite à Moscou dès le 5 juillet en dépit des prérogatives juridiques de la présidence du Conseil de l’Union européenne. Cette « mission de paix » a suscité des réactions indignées partout en Europe, notamment de la part de Josep Borrell, le Haut Représentant et Vice-Président de la Commission pour l’action extérieure.

Comme à l’accoutumée, c’est le scandale qui a donné au leader hongrois l’effet médiatique qu’il recherchait : en continuant son dialogue avec le président russe, il a essayé de préempter l’agenda européen pour les discussions de paix russo-ukrainiennes annoncées pour 2025. Sa stratégie de la provocation n’a pas encore réussi à lui conférer un rôle de chef de file dans la « politique russe » de l’Union européenne : son propre pays a reconduit et amplifié les 14 paquets de sanctions contre la Russie ; les matériels de défense ont continué à être fournis à l’Ukraine ; et la défense européenne figure en bonne place dans l’agenda de la nouvelle Commission. Malgré le soutien du Premier ministre slovaque, la « ligne Orban » reste minoritaire en Europe sur la Russie.

Absence de résultats

Avec les États-Unis, il a appliqué une méthode encore plus radicale : il s’est attribué la fonction de directeur de campagne pour le candidat Trump en Europe n’épargnant ni les discours ni les fonds pour promouvoir l’idéologie conservatrice du désormais président élu. Il a même osé un détournement du slogan MAGA avec un « Make Europe Great Again » pour endosser les fonctions de leader dans les futures relations transatlantiques. Mais peut-il jouer pour l’Europe le rôle que le défunt Premier ministre japonais, Shinzo Abe, avait réussi à obtenir dans les relations de son pays avec le président Trump ? Rien n’est moins sûr tant la taille de l’économie et le format des armées hongroises sont réduites.

Le legs de la présidence hongroise sera d’autant plus limité que les faiblesses structurelles persistent au niveau politique : le poste de commissaire à la santé et au bien-être animal attribué à Olivér Várhelyi ne porte pas sur les dossiers jugés prioritaires par la Hongrie ; le parti du Premier ministre a créé en juin 2024 un groupe parlementaire nouveau avec le Rassemblement National fort de 86 membres mais faible car incapable de prétendre à la centralité face à la victoire du PPE ; enfin, la présidence hongroise du Conseil de l’Union européenne n’a pas éteint les contentieux entre la Commission et la Hongrie : celle-ci a même été poursuivie en 2024 devant la CJCE pour sa législation sur les ingérences étrangères. Autrement dit, la Hongrie redeviendra le mauvais élève de l’Union en matière d’État de droit et de gestion des fonds européens dès sa présidence achevée.

Forte de succès de scandales hors d’Europe mais grevée par l’absence de résultats à Bruxelles, la présidence hongroise du Conseil de l’UE risque d’être oubliée sous peu. »

Cyrille Bret | DR
Cyrille Bret | DR

(*) Chercheur associé à l’Institut Jacques Delors et enseignant à Sciences Po. Auteur de « Dix attentats qui ont changé le monde. » Dunod.

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