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100%, 120%... Quelle hausse de prix le bouclier tarifaire a-t-il permis d'éviter ?

Publié le 16 septembre 2022 à 16h30

Source : JT 13h Semaine

Le plafonnement des tarifs réglementés du gaz et de l’électricité est prolongé pour 2023.
Mais à quelle hausse a-t-on échappé réellement ? D’Emmanuel Macron à Bruno Le Maire, plusieurs chiffres circulent.
En réalité, en l'absence de bouclier tarifaire, la hausse des prix aurait avoisiné les 80% en 2023.

Après avoir mis en place, fin 2021, le bouclier tarifaire, le gouvernement poursuit sur sa lancée et contient encore la flambée des prix en 2023. Ainsi, la hausse des tarifs de gaz et d'électricité va être limitée à 15% pour les ménages, contre un blocage des prix du gaz et une augmentation limitée à 4% pour l’électricité en 2022. "Aujourd’hui, sans action du Gouvernement, les tarifs du gaz et de l’électricité pour les ménages seraient multipliés par 2,2 au début de l'année prochaine. (…) 15% au lieu de 120%, c'est l’engagement que nous prenons", a ainsi exposé la Première ministre en charge des annonces, mercredi 14 septembre.

Des chiffres calculés par le gouvernement

Depuis, le chiffre a été repris aussi bien par Agnès Pannier-Runacher, à l’Énergie, que par Bruno Le Maire, à Bercy. Mais jusqu’à récemment, le ministre évoquait plutôt une hausse des prix évitée de l’ordre de 100% grâce au bouclier tarifaire du gouvernement. Le 5 septembre à l’Élysée, un autre chiffre encore était prononcé. "Avec les mesures que nous avons prises très tôt en France, nous avons évité une hausse d’environ 50 à 70% des prix du gaz et de l'électricité pour nos compatriotes", mettait en avant Emmanuel Macron.

Alors, qu’en est-il ? Pourquoi une telle différence dans les éléments de langage du gouvernement ? La Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), qui avait recommandé le précédent gel mis en place, nous indique que les chiffres évoqués par le gouvernement proviennent de lui-même. Sollicité sur sa méthode de calcul, Matignon n’est pour l'heure pas revenu vers nous.

Nicolas Goldberg, consultant chez Columbus Consulting et fin suiveur des questions énergétiques, a lui-même calculé l’augmentation des prix à laquelle les Français auraient été exposés sans nouveau bouclier tarifaire. En prenant en compte la part marché d’une facture d’électricité, soit 1/6e du montant total, et l’évolution du prix de marché par rapport à l’année précédente, le spécialiste en a déduit que cette hausse était comprise entre 70% et 80% pour 2023, par rapport à 2022. 

Comment expliquer que cette estimation soit assez nettement inférieure à celle de la Première ministre (120%) ? La raison est assez simple : dans son discours de mercredi, pour calculer la hausse de prix évitée, Elisabeth Borne prend comme référence les montants observés en 2021 - année de la mise en place du bouclier tarifaire - et non 2022, comme le fait Nicolas Goldberg.

Or, en 2021, les prix étaient nettement inférieurs à 2022. Thomas Pellerin-Carlin, directeur du Centre énergie de l’Institut Jacques Delors, résume ainsi que "tout dépend du choix du point de référence". 

S’agissant des chiffres d’Emmanuel Macron (50 à 70% d’augmentation), l’explication réside peut-être ailleurs. Dans son allocution, le chef de l’État se satisfait des mesures mises en place "très tôt" par la France, et donc des hausses de prix évitées depuis. Sur ce point, l’Insee a fait le calcul : le gel des tarifs réglementés du gaz, dès octobre 2021, a limité la hausse à "seulement" 37,6%. Sans cette mesure, l'institut estime que l'augmentation aurait été de 105% pour les ménages. Pour ce qui est de l’électricité, les tarifs ont augmenté de "seulement" 4,7%. Sans bouclier, cette hausse aurait été de l'ordre de 36,9%. De manière générale, les prix de l'énergie, carburants inclus, auraient augmenté de 54,2% en l'absence de mesures gouvernementales. 

Entre le deuxième trimestre 2021 et le deuxième trimestre 2022, le prix du gaz pour les ménages a augmenté de 37,6 %. Il aurait augmenté de 105,0 % si le bouclier tarifaire n’avait pas été mis en place.
Entre le deuxième trimestre 2021 et le deuxième trimestre 2022, le prix du gaz pour les ménages a augmenté de 37,6 %. Il aurait augmenté de 105,0 % si le bouclier tarifaire n’avait pas été mis en place. - Commission de régulation de l'énergie, calculs Insee

Si l’inflation évitée avec les mesures provisoires du gouvernement est bien réelle, rares sont les pays européens qui n’ont pas adopté de plans d’urgence. Le Royaume-Uni est l'un des seuls à n'avoir pas agi pour contrer la flambée des prix de l'énergie. Il a été annoncé, au cours de l’été, une augmentation des tarifs en octobre, de l’ordre de 80% pour les ménages. Heureusement pour les consommateurs britanniques, la facture ne va pas autant bondir en réalité. D’après les calculs de Checknews, puisqu’elle sera amortie par des aides et le gel du price cap, décidé par la nouvelle Première ministre, Liz Truss. L’augmentation des prix est plutôt estimée à 33% par rapport à octobre dernier. 

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Caroline QUEVRAIN

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