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Boris Johnson, le faux jumeau de Donald Trump

Boris Johnson, qui devrait être désigné Premier ministre mardi, voit dans Donald Trump un allié. Mais leur relation s'annonce déséquilibrée.

Camille Neveux , Mis à jour le
Donald Trump discute avec Boris Johnson en septembre 2017 à New York.
Donald Trump discute avec Boris Johnson en septembre 2017 à New York. © Reuters

Sur la photo de famille du prochain G7, fin août à Biarritz, émergeront probablement deux tignasses blond platine. Deux têtes de trublions qui n'hésiteront pas à bousculer le politiquement correct dans les réunions, voire à propager des fake news une fois sorties… Le premier, Boris ­Johnson, devrait être désigné ­Premier ministre à l'issue du vote des militants conservateurs britanniques mardi. Le second, Donald Trump , semble avoir trouvé dans l'ex-maire de Londres son alter ego.

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Lire aussi - Mais pourquoi Boris Johnson est-il obsédé par les bus?

Malgré des débuts houleux, la relation semble au beau fixe entre l'ancien journaliste du Daily ­Telegraph né à New York et le président américain. Les deux hommes se sont d'ailleurs parlé vendredi, Trump avançant qu'il ferait "un excellent travail" au 10, Downing Street. "Il y a une affinité entre eux, assure ­Andrew Gimson, auteur de la biographie Boris : The Rise of Boris ­Johnson (éditions Simon & ­Schuster, non traduit). Tous deux sont des ­artistes talentueux qui ont ravi leurs supporters en agaçant des membres sérieux de l'establishment."

Boris Johnson a donné des gages à Donald Trump

Depuis des mois, le candidat conservateur loue lui aussi un leader qui "accède à des recoins de la conscience mondiale comme peu d'autres présidents l'ont fait". En ne défendant pas l'ambassadeur britannique à Washington, poussé début ­juillet à la démission par Trump après la publication de télégrammes qualifiant l'administration américaine d'"inepte", ­Johnson lui a d'ailleurs donné des gages. Au risque d'entamer une relation de complaisance pour ne pas froisser un allié post-Brexit? "Quand il a été mis au défi de critiquer Trump, il a esquivé, principalement en raison de l'importance des relations américano-britanniques", souligne Victoria Honeyman, maître de conférences et spécialiste de la politique britannique à l'université de Leeds.

S'ils semblent faits sur le même moule, leurs parcours divergent. L'ex-ministre britannique des ­Affaires étrangères, qui a fréquenté la prestigieuse université d'Oxford, parle le français, ­maîtrise le grec et le latin, tandis que Trump s'est lancé dans les affaires grâce à son père. Une génération les sépare. "Johnson joue de son image clownesque, mais il est beaucoup moins bête que Trump et il est capable, en bon opportuniste, de changer totalement de cap", note Richard Davis, professeur de civilisation britannique à l'université de Bordeaux-Montaigne. "Il est beaucoup moins enclin que lui à ­fomenter des divisions, souligne aussi son biographe. Sur l'immigration, je m'attends à ce qu'il ait un ton plus libéral et qu'il rappelle aux citoyens européens vivant au Royaume-Uni que tout ira bien pour eux."

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Des divergences à régler

Face à un président américain ingérable, le chouchou de l'électorat tory semble "plus ­mesuré et capable de suivre les conseils donnés par son entourage pour faire profil bas quand il le faut", observe Robin Pettitt, maître de conférences en politiques comparées à l'université Kingston de Londres. "Je ne pense pas que Johnson soit aussi bon que Trump et son équipe lorsqu'il s'agit de faire des déclarations incendiaires qui plaisent à leur base, puis de critiquer ceux qui sont outrés par leurs préjugés", complète, ironique, ­Victoria Honeyman.

Ces différences, même minimes, pourraient compliquer leur idylle lorsqu'il s'agira de parler de chef d'État à chef d'État. "La relation américano-britannique sera inégale, Trump privilégiant toujours le 'America First', souligne Richard Davis. Même s'ils n'ont pas beaucoup d'autres alliés possibles car ­Johnson va forcément se fâcher avec les Européens sur le Brexit." Un paradoxe lorsque l'on sait que sur les questions environnementales comme sur le dossier iranien, le Royaume-Uni reste bien plus proche du Vieux Continent que de l'administration américaine…

Boris Johnson ne s'est pas affiché avec Donald Trump en juin 

Le déséquilibre se fera très vite sentir lorsqu'il s'agira de ­négocier ce dont Jonhson rêve pour pallier la sortie britannique de l'Union européenne : un accord de libre-échange entre les deux pays. Quitte à autoriser l'entrée sur le sol anglais de poulets américains lavés au chlore, ou à fragiliser un peu plus le Service national de santé (NHS), qui réglemente les tarifs des médicaments, face au rouleau compresseur de l'industrie pharmaceutique américaine… "L'Otan sera un autre gros problème, ­souligne Victoria ­Honeyman à Leeds. La Grande-­Bretagne pourrait perdre le peu de marge de manœuvre dont elle dispose actuellement et s'attendre à soutenir les États-Unis à l'étranger beaucoup plus que ce qui se passe déjà, ce qui est profondément préoccupant."

Certains rappellent néanmoins que Johnson n'a pas tenu à s'afficher publiquement avec son faux jumeau lors de sa dernière visite d'État au Royaume-Uni, début juin. L'ébauche d'une prise de conscience? "Le président américain n'y est pas du tout populaire, notamment à cause du mépris qu'il a de la monarchie et de la reine, ­rappelle Elvire Fabry, chercheuse senior politique commerciale et Brexit à l'Institut Jacques Delors. Lorsque nous entrerons dans le dur des négociations, les masques tomberont." 

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