Pêche pour tous, tous contre un ! Quatre mois après la mise au point de l’accord commercial entre le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE), la hache de guerre n’est pas enterrée. Le Parlement européen a validé mardi 27 avril le texte de loi, selon le résultat d’un vote officiellement annoncé mercredi. 660 députés ont approuvé l’accord, sur 697 votants.

Le contentieux se poursuit en mer. Mardi, la France, par son secrétaire d’État aux affaires européennes Clément Beaune, s’est offusquée du non-respect de l’accord sur la pêche par les Britanniques. « Nous demandons tout l’accord, rien que l’accord et tant qu’il ne sera pas mis en place (…) nous prendrons des mesures de rétorsion dans d’autres secteurs si c’est nécessaire », a-t-il déclaré sur la chaîne BFM Business.

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Et de citer « uncertain nombre d’autorisations sur les services financiers» attendues par les Britanniques de la part de l’UE. « Nous n’en donnerons aucune tant que nous n’aurons pas les garanties que sur la pêche et d’autres sujets, le Royaume-Uni respecte ses engagements. » Londres accuse de nombreux retards de mise en œuvre de l’accord sur le Brexit, y compris sur la pêche. Elle était déjà au cœur des dissensions qui avaient fait traîner les négociations en longueur.

Une licence pour du poisson

L’accord trouvé en décembre prévoit une période de transition permettant aux pêcheurs européens (principalement français mais aussi portugais, espagnols, belges, hollandais, irlandais, danois et suédois) de naviguer dans les eaux poissonneuses britanniques avant de devoir renoncer, après l’été 2026, à 25 % de leurs prises. Pour accéder à ces eaux (entre 6 et 12 milles marins), les navires doivent obtenir une licence des autorités britanniques. Seuls 22 des 120 bateaux de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) l’ont reçue à ce jour.

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Londres leur demande de démontrer qu’ils pêchaient déjà dans cette zone entre 2012 et 2016. Mais faute d’équipements GPS adéquats pour le prouver, nombre d’entre eux restent bloqués au port. La faute à une mauvaise volonté britannique ? Elvire Fabry, chercheuse senior à l’Institut Jacques-Delors et spécialiste du Brexit, y voit une forme de renvoi d’ascenseur vers l’UE.

Meilleurs ennemis en affaires

« À partir du 1er janvier, les pêcheurs britanniques ont été confrontés aux nouvelles démarches administratives qu’ils devaient remplir et tout une série de bateaux sont restés à quai parce qu’ils ne pouvaient pas vendre leur poisson sur le marché européen », rappelle-t-elle. « Or, le Royaume-Uni est très dépendant de ses exportations de poisson vers l’UE. C’est une façon de faire passer la pilule pour les pêcheurs britanniques qui ont largement voté pour le Brexit. »

« Il ne faut pas oublier que l’UE a mis un embargo sur certains produits comme les coquillages », renchérit le directeur de l’Observatoire du Brexit, Aurélien Antoine. En brandissant la menace du blocage de l’octroi d’équivalences sur les services financiers, Clément Beaune agite la menace d’une fuite des entreprises de Grande-Bretagne vers l’UE. De nombreux acteurs financiers ont déjà quitté la City de Londres pour s’installer à Amsterdam, Paris, Dublin, Milan ou encore Francfort.

Mais Aurélien Antoine le rappelle : « Ce n’est pas à la France de décider de mesures de rétorsions », mais à l’Union européenne une fois tous les canaux de discussion et procédures d’arbitrage épuisés.