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Bruxelles lance le débat sur la « sécurité économique » de l'UE

La Commission européenne présentera mardi une communication notable sur la réponse à donner à des risques croissants. Elle proposera aussi un fonds de souveraineté et des ressources propres pour le budget européen.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ajoutera mardi une dimension économique à sa réflexion « géopolitique ».
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ajoutera mardi une dimension économique à sa réflexion « géopolitique ». (Johanna Geron/Reuters)

Par Karl De Meyer

Publié le 19 juin 2023 à 08:26

En préparation du Conseil européen des 29 et 30 juin, la Commission européenne doit publier ce mardi une communication notable sur la « sécurité économique » de l'UE. Seize mois après l'invasion de l'Ukraine qui a souligné le danger des dépendances et trois ans après le début de la pandémie qui a révélé la complexité des chaînes logistiques, le texte engage les Vingt-Sept à débattre de la meilleure façon de garantir la base technologique et l'appareil de production de l'Union.

« A ce stade, l'ambition de la Commission est d'engager une réflexion plutôt que de livrer une stratégie toute ficelée », analyse Elvire Fabry, experte de l'Institut Jacques Delors. Il n'en reste pas moins que le vocable est nouveau. « L'intérêt de cette communication se trouve notamment dans sa rhétorique, indique une source de la Commission. Ce texte n'aurait pas été possible au début du mandat en 2019 », à savoir avant la pandémie.

Outre la sécurisation de l'approvisionnement en énergie et en matières premières , le texte traitera du contrôle des investissements. Il devrait inviter à réexaminer les règles actuelles sur l'examen des investissements entrants dans l'UE, dans des secteurs sensibles. « Il devrait aussi poser la question du contrôle des investissements sortants de l'UE, pour éviter certains transferts de technologie, indique Elvire Fabry. C'est compliqué à faire, il faut procéder à une analyse fine des risques, puis poser des critères de contrôle. »

Evolution de l'Allemagne

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Là aussi, le curseur du débat a évolué depuis quelques mois. Traditionnellement, l'Allemagne était réticente à l'idée de contrôler les investissements réalisés dans des pays tiers, notamment de peur de froisser la Chine. Mais Berlin a récemment durci son attitude longtemps très conciliante à l'égard de Pékin. Le gouvernement d'Olaf Scholz recevra à Berlin, précisément le 20 juin, une délégation chinoise conduite par le Premier ministre, Li Qiang.

Autre question que la Commission devrait poser : à quelles conditions peut-on laisser des entreprises de pays tiers participer aux programmes de recherche stratégiques financés par l'UE ? Les pays les plus attachés au libre-échange (Allemagne, Pays-Bas, Suède, Irlande) devraient veiller à ce que ces nouveaux axes de travail ne soient pas perçus comme une forme de protectionnisme, mais comme une affirmation de soi de la part de l'UE.

Outil de politique industrielle

En parallèle, Bruxelles devrait proposer mardi la création d'un fonds de souveraineté , même s'il ne devrait pas porter ce nom. Il ne s'agit pas d'un fonds souverain « à la norvégienne » doté de centaines de milliards d'euros. Mais plutôt d'un nouvel instrument capable d'investir rapidement dans un secteur critique où apparaît un besoin urgent, y compris via des participations capitalistiques.

Pas uniquement dans une technologie de pointe, mais aussi dans des entreprises capables de produire vite un produit indispensable ou des sociétés essentielles à toute une chaîne de valeur. Ce fonds de souveraineté serait donc un outil de politique industrielle, pensé comme un prototype sur lequel on pourrait bâtir à l'avenir quelque chose de plus puissant.

Argent frais

Reste à voir si ce fonds bénéficiera d'argent frais. Des eurodéputés craignent de voir naître une simple nouvelle ombrelle chapeautant des programmes déjà en place. Dans une lettre à Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, en date du 13 juin, la délégation L'Europe Ensemble (centristes français) du Parlement européen a prévenu qu'« il ne sera pas suffisant de passer uniquement par des redéploiements et des relabélisations de fonds déjà existants pour atteindre nos ambitions et être un concurrent crédible sur la scène internationale ».

Enfin, Bruxelles va proposer une révision du Cadre financier pluriannuel 2021-2027, presque à mi-parcours. La brutale remontée des taux d'intérêt a considérablement renchéri le montant des intérêts à payer sur les fonds levés pour le gigantesque plan de relance post-Covid NextGenEU. La guerre en Ukraine, qui risque de durer, nécessite de mettre en place des financements de long terme pour assurer le fonctionnement du pays, au-delà de l'aide macrofinancière déjà prévue pour 2023. La gestion des migrations requiert aussi de nouveaux moyens.

La Commission va donc proposer de nouvelles ressources pour le budget de l'UE. D'abord en demandant aux Etats membres d'entériner l'intégration au budget des recettes du marché carbone européen et du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières.

Bruxelles devrait aussi suggérer des contributions des Etats membres, assises sur les bénéfices réalisés par leurs entreprises. Un mécanisme de correction doit éviter que certains Etats membres avec beaucoup de sièges de multinationales, comme l'Irlande ou le Luxembourg, ne versent un écot disproportionné par rapport à leur PIB. Certains eurodéputés veulent aller plus loin et réclament d'autres ressources propres.

Karl De Meyer (Bureau de Bruxelles)

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