Le scénario était presque parfait, avant d’être bousculé par la réalité. Emmanuel Macron espérait faire de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne (UE), assurée par la France jusqu’en juin, une sorte de tremplin vers le scrutin présidentiel.
L’exercice devait lui permettre à la fois de conforter son influence sur le continent et de mettre en avant ses convictions pro-européennes, dans la campagne officieuse engagée pour sa réélection. Avec un leitmotiv : démontrer aux Français que l’UE peut agir comme un filet protecteur dans un monde souvent hostile. Défense, climat, relance économique, migration, numérique, santé, son gouvernement entend défendre la souveraineté du Vieux Continent dans toutes ses dimensions, avec l’adoption d’une série de textes en cours de discussion au sein des Vingt-Sept.
C’était sans compter avec l’actualité internationale, son lot d’incertitudes et de mauvaises surprises : la crise ukrainienne et les tensions avec le Mali sont venues compliquer cet agenda et mettre à mal les discours français sur la « puissance » européenne et son autonomie stratégique.
Ainsi, les menaces d’invasion de la Russie en Ukraine douchent-elles le souci d’autonomie à l’égard des Etats-Unis volontiers cultivé à Paris, alors que, face à Moscou, nombre de capitales européennes s’en remettent plus que jamais à Washington pour assurer leur défense, dans le cadre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), elle-même en pleine rédemption, six mois après la débâcle suscitée par le retrait précipité d’Afghanistan des troupes américaines. « La crise donne une nouvelle raison d’être à l’Alliance atlantique, constate Sébastien Maillard, directeur de l’Institut Jacques Delors, c’est toute la difficulté de passer d’un discours volontariste aux actions décidées ensemble. »
Méfiance des pays d’Europe de l’Est
Parmi les priorités françaises, les travaux en cours à Bruxelles sur la « boussole stratégique », censée muscler la défense européenne à l’horizon 2030, pourraient faire les frais des tensions autour de l’Ukraine : nombre de pays d’Europe de l’Est, à commencer par la Pologne, ont fait savoir que la priorité était de renforcer le lien transatlantique avec l’administration américaine de Joe Biden, plutôt que la dynamique européenne, encore embryonnaire dans ce domaine. Ils se méfient notamment de la création d’une force de réaction rapide (5 000 hommes) proposée, avec le soutien de Paris, par Josep Borrell, le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères. Leur argument : ne pas dupliquer des capacités déjà mises en place par l’OTAN.
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