Enrico Letta, le bon élève de la gauche face à l'extrême droite italienne

Europhile fervent issu de la démocratie chrétienne, ministre précoce et mine de bon élève, l'ancien chef de gouvernement italien Enrico Letta fait tout pour barrer la route à l'extrême droite aux législatives de dimanche et défendre la place de son pays dans l'UE.

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Enrico Letta
Enrico Letta ©AFP

Secrétaire national du Parti démocrate (PD, centre gauche), ce juriste un peu raide dans son costume est cependant donné perdant par les sondages face à la bouillante Giorgia Meloni, cheffe du parti post-fasciste Fratelli d'Italia.

Meloni, 45 ans, peut en outre s'appuyer sur son alliance avec la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi.

Le PD, lui, n'emmène qu'un modeste parti de la gauche écologiste. Il compte sur les 20% d'indécis: "Si nous arrivons à mobiliser 10% d'entre eux, nous gagnerons les élections", assurait Enrico Letta dans un entretien à l'AFP fin août.

Pour ce Toscan de 56 ans au CV long comme le bras - docteur en droit international, il a enseigné en Italie, à HEC et a dirigé l'Ecole des affaires internationales de Sciences-Po -, une victoire aux législatives permettrait d'effacer le cuisant souvenir de ses neuf mois passés à la tête du gouvernement à partir d'avril 2013.

Enrico Letta, le bon élève de la gauche face à l'extrême droite italienne
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Après avoir pris la tête du PD en décembre 2013, son grand rival, l'ambitieux Matteo Renzi, alors maire de Florence, fait voter en interne en février de l'année suivante une motion réclamant la formation d'un nouveau gouvernement. Et donc la tête de Letta.

Mis en minorité au sein de son parti, Enrico Letta démissionne, aussitôt remplacé par... Matteo Renzi.

Interrogé sur cet épisode près de dix ans plus tard - entre-temps Matteo Renzi a fait dissidence et créé son propre parti -, Enrico Letta ne laisse transparaître aucun ressentiment. "Le monde politique est cruel comme est cruel tout type de relation complexe, mais il sait aussi être généreux", dit-il dans un sourire.

'Moins timide'

Né a Pise le 20 août 1966, M. Letta a passé une bonne partie de son enfance avec sa famille à Strasbourg (est de la France).

Président des jeunes démocrates-chrétiens de 1991 à 1995, il est nommé ministre des Affaires européennes en 1998 par l'ancien chef du gouvernement Massimo d'Alema, devenant à 32 ans le plus jeune ministre de l'histoire de la république italienne. D'Alema le désignera, une année plus tard, ministre de l'Industrie, puis ministre du Commerce extérieur en 2000.

En 2004, il est député au Parlement européen sous l'étiquette de l'Olivier (centre gauche), puis nommé en 2006 secrétaire du Conseil des ministres par le chef du gouvernement de l'époque, Romano Prodi.

Ironie du sort, il remplace alors à ce poste son oncle, Gianni Letta, homme de confiance et conseiller tout puissant de Silvio Berlusconi, qui vient alors d'être chassé du pouvoir.

Plusieurs fois député depuis 2001, il dit s'inscrire dans les pas de l'ancien président de la Commission européenne Jacques Delors. Il préside d'ailleurs depuis 2016 l'Institut Jacques Delors, un organisme de recherche sur les questions européennes basé à Paris.

Homme de dossiers, Enrico Letta est l'auteur de plusieurs livres, dont "Bâtir une cathédrale, pourquoi l'Italie doit se remettre à penser en grand". C'est aussi un grand amateur de BD qui a fait découvrir à ses trois fils Astérix et Tintin.

Front dégarni, fines lunettes d'intellectuel, cet homme marié en seconde noce à une journaliste du Corriere della Sera ne semble pas devoir élever la voix pour se faire entendre.

Il affirme pourtant avoir appris de la vie politique et de ses étudiants à être "moins timide et plus tranché", à mettre "de la radicalité" dans ses mots et dans ses combats prioritaires que sont "l'environnement, les droits, le social".

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