Il s'est gardé l'étape la moins réjouissante pour la fin : c'est à Budapest, ce lundi, qu'Emmanuel Macron met un terme à la tournée des 26 capitales européennes lancée au début de son mandat. Et pour cause : le Premier ministre hongrois Viktor Orban "est un adversaire politique", a rappelé, jeudi dernier, l'hôte de l'Élysée, lors de la présentation des priorités de la présidence française de l'Union européenne (PFUE).

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Leurs convictions européennes les opposent en effet de façon catégorique. D'un côté un europhile, partisan d'une plus grande intégration communautaire ; de l'autre un eurosceptique aux accents populistes, qui n'a jamais de mots assez durs contre Bruxelles et n'a pas hésité à recevoir les deux candidats d'extrême droite de la présidentielle française d'avril prochain, Marine Le Pen et Eric Zemmour.

Pour autant, Emmanuel Macron a également souligné que Viktor Orban était un "partenaire européen". Qu'il le veuille ou non, il ne peut se passer du dirigeant magyar, qui peut gripper les - grandes - ambitions du président français pour l'Europe. "Il possède un pouvoir de nuisance sur les projets qui nécessitent l'unanimité des Vingt-Sept", indique Sébastien Maillard, directeur de l'Institut Jacques Delors.

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Le projet d'un salaire minimum européen, dont le président français souhaiterait faire l'une des grandes réalisations de la PFUE, en est une parfaite illustration. Avec le Danemark, la Hongrie est le seul pays à être opposée au projet de directive de la Commission. Mais Paris ne désespère pas d'emporter son assentiment, alors que s'ouvrent les négociations avec le Parlement de Strasbourg pour aboutir à un texte faisant consensus.

Points de convergence entre Paris et Budapest

Sur d'autres sujets, comme la réforme de l'espace Schengen, le soutien de la Hongrie semble plus simple à obtenir. La visite de Viktor Orban à l'Élysée, en octobre 2019, avait ainsi permis de constater des rapprochements sur la protection des frontières continentales, comme sur la nécessité de renforcer la défense européenne. En la matière, le Premier ministre hongrois a déjà fait certains gestes appréciés à Paris, comme l'envoi au Mali, début 2022, d'un contingent de 80 soldats, dans le cadre de l'initiative française du groupement européen de forces spéciales Takuba.

Ce n'est pas tout : Viktor Orban rejoint également Emmanuel Macron sur le nucléaire, que celui-ci veut faire figurer dans le projet de taxonomie verte. Et pour cause : près de la moitié de l'électricité hongroise est produite par son unique centrale, Paks, où intervient le Français Framatome. Paris identifie également des convergences de vue avec Budapest sur la taxe carbone et la mise en place de nouvelles filières industrielles sur le continent.

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Avant tout, l'Élysée veut éviter que ses projets pour l'UE soient pollués par la guerre de tranchée sur l'Etat de droit entre Bruxelles d'un côté, la Hongrie et la Pologne de l'autre. "A cet égard, le déplacement de ce lundi met l'accent sur le dialogue, plutôt que sur les poursuites juridiques en cours sur cette question", souligne Sébastien Maillard. De fait, le sujet reviendra bien assez tôt sur la table. En janvier prochain, la Cour de justice de l'UE devrait valider le mécanisme Etat de droit susceptible de priver Budapest et Varsovie des fonds du plan de relance. Une séquence qui pourrait se révéler des plus délicates pour Emmanuel Macron.

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