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La République tchèque tourne la page Babiš

Après bien des péripéties liées à l'état de santé du président, un nouveau gouvernement tchèque va entrer en fonction vendredi, après le vote du Parlement. La République tchèque tourne ainsi la page Babiš, un milliardaire contesté sans grande intégrité.

Le président de la République, Miloš Zeman, à l'arrière-plan, a nommé le dirigeant du parti conservateur, Petr Fiala, Premier ministre.
Le président de la République, Miloš Zeman, à l'arrière-plan, a nommé le dirigeant du parti conservateur, Petr Fiala, Premier ministre. (Roman Vondrous/Pool via REUTERS)

Par Catherine Chatignoux

Publié le 17 déc. 2021 à 08:53

Les alliances politiques se révèlent une méthode efficace pour débarquer des chefs de gouvernement à l'éthique contestée à l'est de l'Europe. En Bulgarie, c'est un regroupement de quatre partis unis par un pacte anti-corruption qui vient de détrôner Boïko Borissov, un dirigeant au passé trouble et régulièrement soupçonné de tremper dans des affaires de corruption. En Hongrie, l 'opposition tout entière s'est rassemblée pour se donner une chance de faire tomber l'illibéral Viktor Orbán aux élections législatives d'avril prochain. A Prague, c'est une coalition regroupant au total 5 partis qui a battu Andrej Babiš, l'une des premières fortunes du pays, accusé de détournement de fonds européens et de conflit d'intérêts pour avoir maintenu des liens avec son conglomérat Agrofer durant son mandat.

Si le chef du parti libéral et conservateur (ODS), Petr Fiala, politologue de formation, ne s'était pas rallié le soutien de deux partis centristes, l'un chrétien-démocrate, l'autre libéral, (TOP 09), il ne serait pas arrivé en tête du scrutin des 8 et 9 octobre dernier , coiffant au poteau le parti ANO d'Andrej Babiš. Les révélations des Pandoras Papers sur l'achat en toute opacité d'une villa dans le sud de la France par le Premier ministre sortant ont certainement précipité sa défaite.

Conditions rocambolesques

Dès le lendemain du scrutin, le vainqueur Petr Fiala a annoncé un accord de gouvernement avec une formation opposée à Babiš, Pirates et Maires. Créée elle aussi en 2020 en vue des élections législatives, elle associe le Parti pirate tchèque (Piráti) et Maires et Indépendants (STAN) sur un projet conjuguant libéralisme économique, europhilie et démocratie directe. Le gouvernement issu de cette coalition doit être approuvé vendredi par une majorité de 108 sièges sur 200.

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La formation du nouveau gouvernement s'est faite dans des conditions assez rocambolesques puisqu'au lendemain des élections, le président de la République tchèque, Miloš Zeman, est tombé dans le coma et a été amené en urgence à l'hôpital. L'homme boit et fume beaucoup, depuis longtemps. Il a fallu attendre le 9 novembre pour que, sorti d'affaires mais toujours hospitalisé pour ses problèmes hépatiques, il charge officiellement le chef de l'Alliance de centre droit de former un gouvernement. Et c'est seulement le 28 novembre que le président, atteint cette fois du Covid-19, a nommé son adversaire politique Petr Fiala au poste de Premier ministre. Les dirigeants des 5 partis aspirant au pouvoir avaient eu entretemps largement le temps de finaliser leur accord de gouvernement fixant les priorités et la répartition des ministères.

Menace de veto

Miloš Zeman, qui a toujours soutenu Andrej Babiš , un homme d'affaires sans grand scrupule, souverainiste, a compliqué un peu plus la formation du gouvernement en exigeant de recevoir tous les candidats ministres et en refusant sans toutefois le nommer explicitement, le prétendant au poste des Affaires étrangères. Le Pirate Jan Lipavsky, à la culture politique proche des Verts allemands, a pris des positions très dures contre la Chine et la Russie que Miloš Zeman ne cesse de ménager. Ce dernier lui reproche en outre la tiédeur de ses positions sur Israël et sur le groupe de Visegrad.

Unie dans le combat contre le Premier ministre sortant, « la coalition qui va entrer en fonction vendredi souffre d'une grande fragilité, explique Lukáš Macek, chercheur associé à l'Institut Jacques-Delors. Elle fait le grand écart entre son aile eurosceptique, représentée par le parti de Petr Fiala et la mouvance pro-européenne des Pirates. Le gouvernement risque donc de se diviser sur l'Europe. « Que se passera-t-il si les Etats membres sont appelés à sanctionner la Hongrie ou la Pologne sur l'Etat de droit ? » s'interroge-t-il. L'autre risque pour le parti conservateur tchèque, pilier central de ce nouvel exécutif, est de retomber dans son affairisme et ses relations pas toujours saines avec les milieux économiques.

Catherine Chatignoux

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