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L'interdiction des visas russes, nouveau terrain de division de l'Union européenne

Parmi les nouvelles sanctions envisagées à l'encontre du Kremlin, la limitation voire l'interdiction totale, pour les ressortissants russes, de circuler au sein de l'espace Schengen. Bruxelles tente d'élaborer une réponse européenne unanime alors que les politiques nationales divergent sur la question. Moscou s'est dit prête à répliquer.

L'UE étudie une suspension totale de l'accord de 2007 avec Moscou, prévoyant des facilités de délivrance de visas de court séjour aux ressortissants russes.
L'UE étudie une suspension totale de l'accord de 2007 avec Moscou, prévoyant des facilités de délivrance de visas de court séjour aux ressortissants russes. (iStock)

Par Léocadie Martin

Publié le 29 août 2022 à 17:18Mis à jour le 31 août 2022 à 17:39

Interdire l'Europe aux touristes russes ? Certains pays n'ont pas attendu l'agenda européen pour sévir et limiter l'accès à l'espace Schengen. Pourtant, la sanction divise les 27. ​Le conseil - informel- des ministres européens des Affaires étrangères réunis à Prague cette semaine, s'est emparé du dossier. Une première tentative pour faire front commun.

Début août, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, avait farouchement appelé les Occidentaux à fermer la porte aux Russes afin qu'ils vivent « dans leur propre monde jusqu'à ce qu'ils changent de philosophie ». Un isolement présenté comme « la seule façon d'influencer Vladimir Poutine ».

La Russie a d'ores et déjà averti qu'elle prendra des mesures de rétorsion si l'UE applique cette nouvelle sanction, jugée « irrationnelle ». « Nous savons qu'il y a des points de vue différents parmi les Européens, nous suivrons cela de près [...] Une telle décision ne saurait rester sans réponse », a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

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Plusieurs ressortissants russes font déjà l'objet d'une interdiction d'entrer en territoire européen. Plus de 1.200 responsables ont été déclarés persona non grata. L'UE a également suspendu l'accord sur l'assouplissement du régime des visas pour les Russes. Toutefois, certains pays membres souhaitent avoir la main plus ferme.

Prague en pionnier

Depuis le 25 février, la République tchèque n'octroie plus de visas aux ressortissants russes. Il devient ainsi le premier Etat membre à fermer ses frontières à de simples citoyens. Prague, actuellement à la présidence tournante du conseil de l'UE, plaide à présent pour une interdiction totale des visas russes à l'échelle du l'UE.

Plusieurs pays européens défendent à ses côtés l'entrée en vigueur de cette restriction : l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, le Finlande, le Danemark, la Norvège et la Pologne. En cas de désaccord entre les 27, la Lituanie a d'emblée évoqué la mise en place d'une « solution régionale ».

Des voisins fermes

Les pays frontaliers de la Russie n'ont pas tardé à appliquer cette ligne de conduite. A leur tour, la Pologne et les pays Baltes ont cessé toute délivrance de visas aux citoyens russes. « Visiter l'Europe est un privilège, pas un droit humain », a déclaré Kaja Kallas, Premier ministre d'Estonie.

La Finlande figure également parmi les pays les plus offensifs. Le volume de visas livrés aux touristes russes sera amputé de 10 % , à compter du 1er septembre. Depuis la fermeture de l'espace aérien européen, le pays nordique fait souvent office de porte d'entrée vers d'autres Etats du continent. Il traite quotidiennement près de 1.000 demandes de visas provenant de Russie.

Bruxelles sceptique

Sur la question de la fermeture des frontières, Bruxelles ne fléchit pas et freine la cadence. Ce « n'est pas une bonne idée », estime le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrel. Une prise de position partagée par le chancelier allemand. Celui-ci évoque notamment les difficultés que rencontreraient « tous les gens qui fuient la Russie parce qu'ils sont en désaccord avec le régime russe ». La Grèce et Chypre se sont également prononcés contre l'interdiction des visas russes.

Dans un nouveau document de Paris et Berlin, les deux pays ont réaffirmé leur opposition. « Nous devons livrer une bataille stratégique pour 'le coeur et l'esprit' de la population russe - du moins la partie qui n'a pas encore totalement perdu le contact avec 'l'Ouest' ». Ils soulignent l'importance « de découvrir de ses propres yeux la vie dans des systèmes démocratiques, en particulier pour les générations futures ».

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Pour plusieurs chercheurs, une telle politique irait à l'encontre de la ligne d'action européenne. « Cette mesure est contraire à la liberté de mouvement et à la politique de sanctions qu'elle a suivie jusqu'à présent en affirmant qu'elle n'est pas contre le peuple russe mais contre le régime », souligne Cyrille Bret de l'Institut Jacques Delors. Marie Dumoulin, experte de l'ECFR (Conseil européen pour les relations internationales), ajoute qu'une telle action « alimenterait la propagande du Kremlin qui depuis des années [...] dénonce la russophobie supposée des Occidentaux ».

Selon une source diplomatique européenne, les divisions sont telles sur la question que le consensus semble impossible. Pour l'heure, les discussions qui se déroulent à Prague s'orientent vers des mesures restrictives plutôt qu'une interdiction totale. L'accord de facilitation de délivrance des visas a ainsi été suspendu, engageant des procédures plus longues et coûteuses pour les touristes russes.

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