Va-t-on assister à un retour de la guerre commerciale entre l’Europe et les Etats-Unis ? Après les conflits au sujet des subventions aux constructeurs aéronautiques Airbus et Boeing ou sur les droits de douane appliqués à l’acier et l’aluminium européen, désormais apaisés, un autre dossier empoisonne les relations entre Washington et Bruxelles. La création d’un crédit d’impôts allant jusqu’à 7 500 dollars (7 520 euros) pour l’achat de véhicules électriques produits (batterie incluse) aux Etats-Unis, au Canada et au Mexique. Cette mesure a été votée le 11 août par le Congrès dans le cadre de la loi sur la réduction de l’inflation voulue par Joe Biden.
Si, à Bruxelles, on comprend les ressorts politiques internes d’une telle décision à l’approche des élections de mi-mandat, le président américain démocrate étant fortement soutenu par le puissant syndicat de l’automobile l’UAW très implanté dans certains Etats-clés du Midwest, cette décision n’en est pas moins discriminatoire pour les Européens. Et ce d’autant plus, que sur le Vieux Continent, l’essentiel des pays membres ont mis en place des aides et autres bonus à l’achat de « wattures » (véhicules électriques) quel que soit leur lieu de production.
Pour de nombreux acteurs européens, il est donc urgent d’agir. Dès le 17 août, l’Association des constructeurs européens d’automobiles faisait état de sa forte « déception » après l’annonce de la mesure américaine. « Les aides à l’achat sont très importantes pour lancer un marché et faciliter l’adoption des véhicules électriques, rappelle le lobby européen. Afin d’atteindre l’objectif de 50 % des ventes de voitures zéro émissions d’ici 2030, il faut des mesures d’aides bien plus inclusives. »
Un marché très rentable pour les Européens
Les Etats-Unis, avec une part des débouchés de l’électrique encore modeste (5,6 % au deuxième trimestre 2022, soit 432 000 modèles écoulés), sont un marché historiquement très rentable pour les marques européennes, et surtout allemandes. Si Volkswagen y a perdu de sa superbe depuis le « dieselgate », Audi, BMW, Mercedes ou Porsche y tiennent encore la dragée haute à Tesla et y vendent ensemble près d’un million de berlines chaque année. Bref, ces groupes comptent bien rentabiliser leurs investissements colossaux dans leurs nouveaux modèles électrifiés.
A Washington, l’Alliance pour l’innovation automobile, un lobby qui rassemble des constructeurs américains et européens, rappelle par ailleurs que « sur 72 modèles électrifiés proposés aujourd’hui dans le pays, 70 % ne pourraient pas être éligibles. Et aucun ne pourra obtenir le crédit d’impôt complet quand il faudra prendre en compte le lieu d’approvisionnement des matériaux de base des batteries [terres rares, lithium, etc.] », écrit John Bozzella, le président de cette alliance sur son blog.
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