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Payer le gaz en roubles : Moscou peut-il cesser de vendre son gaz en Europe ?

Le Kremlin demande le paiement de son énergie en roubles. En réponse, l’Europe devrait contourner la mesure grâce à un tour de passe-passe.
L’homme fort du Kremlin menace de cesser les approvisionnements en gaz aux pays dits « inamicaux ». Photo © Mikhail Klimentyev/AP/SIPA

En réponse à la batterie de sanctions financières imposée par l’Occident depuis le début du conflit en Ukraine, Vladimir Poutine contre-attaque. Au cœur de la stratégie du président de la fédération de Russie : l’énergie. L’homme fort du Kremlin menace de cesser les approvisionnements en gaz aux pays dits « inamicaux » si ceux-ci ne payent pas en roubles, indique le quotidien Libération. « Nous avons livré aux consommateurs européens nos ressources de gaz, ils les ont reçues, nous ont payés en euros, et ensuite ils gèlent ces euros. Alors, de fait, une partie du gaz livré en Europe, nous le livrons gratuitement. Pour acheter du gaz naturel russe, ils doivent ouvrir des comptes en roubles dans des banques russes », a-t-il déclaré lors d’un point gouvernemental diffusé à la télévision. La mesure doit prendre effet à partir du vendredi 1er avril, sans pour autant susciter l’affolement de l’Europe.

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Couper le robinet

Quelle est la stratégie de Vladimir Poutine ? « Ce jeu de poker menteur permet au président russe de recentrer le débat, de renforcer temporairement le rouble et de tester la solidarité européenne », estime Phuc-Vinh Nguyen, spécialiste en politique énergétique à l’Institut Jacques-Delors, à Libération. L’Europe, très dépendante au gaz russe pourrait être en mauvaise posture si Moscou venait à cesser l’approvisionnement énergétique en réponse aux sanctions de l’Occident.

Mais cette décision pourrait se heurter à plusieurs obstacles. « Une limite physique, car il faudrait plusieurs jours, voire plusieurs semaines pour cesser l’approvisionnement depuis les champs gaziers. Si ce processus avait commencé, on le verrait au niveau des flux, ce n’est pas le cas », analyse Phuc-Vinh Nguyen. Plus encore, cette mesure impliquerait la rupture des contrats, créant une situation d’instabilité juridique et privant la Russie d’une manne financière considérable. Chaque jour, les Européens règlent une facture de presque 800 millions d’euros à la Russie pour ses produits énergétiques.

Refus des Européens

A ce stade, les Européens refusent de régler leurs factures de gaz en roubles.  « Les contrats prévoient une monnaie dans laquelle ils sont exécutés et donc les contrats doivent être exécutés dans la monnaie prévue », a rappelé le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, en visite à Berlin. Une position également soutenue par le chancelier allemand, Olaf Scholz. Mais un arrangement aurait été trouvé entre les deux parties : les entreprises paieraient dans les devises prévues, les banques, elles, convertiraient ces sommes en roubles. C’est notamment le cas de Gazprombank. L’établissement financier russe a jusqu’ici été épargné par les sanctions occidentales.

Reste que la menace d’une coupure de l’approvisionnement en gaz plane. Une éventualité que n’exclut pas Bruno Le Maire qui a ajouté « préparer les scénarios » pour faire face à cette situation. En attendant, la France peut encore compter sur ses stocks de gaz, remplis à 22 %.  Une réserve qui permettrait de tenir entre « 22 et 30 jours » en autarcie, estime Phuc-Vinh Nguyen. Si un tel scénario venait à se réaliser, l’Hexagone devrait se tourner vers d’autres fournisseurs et inciter sa population à réduire sa consommation.

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