Charles Michel appelle à un renforcement du marché unique face aux subventions vertes américaines

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Enrico Letta (gauche), Président de l’Institut Jacques Delors et le Président du Conseil européen Charles Michel (droite)

Le président du Conseil européen Charles Michel a affirmé mercredi (17 avril) que l’UE devrait réagir au programme de réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act, IRA) des États-Unis, doté de plusieurs milliards de dollars, en renforçant son marché unique pour les capitaux financiers.

Lors d’une conférence de presse à Bruxelles en compagnie de l’ancien Premier ministre italien Enrico Letta, qui doit présenter son rapport sur le marché unique aux dirigeants de l’UE jeudi (18 avril), M. Michel a affirmé qu’une plus grande intégration de l’Union des marchés des capitaux (UMC) pourrait débloquer des « billions d’euros » d’investissements potentiels, rivalisant voire dépassant les 369 milliards de dollars du programme de subventions vertes des États-Unis.

« Je suis absolument convaincu que l’Union des marchés des capitaux est le meilleur IRA européen que nous puissions développer, puisque ce sont des billions d’euros de moyens qui peuvent être mobilisés — et qui ne le sont pas aujourd’hui — pour stimuler, soutenir, investir, développer l’innovation », a affirmé M. Michel.

Il a insisté sur l’importance de consolider les marchés européens de l’énergie et des télécommunications ainsi que de réduire les charges administratives pesant sur les entreprises, des mesures « clés » pour inverser le déclin industriel de l’Europe, selon lui. Ces propositions reflètent en outre les recommandations du rapport d’Enrico Letta.

Toutefois, le président du Conseil a mis davantage l’accent sur la nécessité d’accorder une plus grande « confiance » au secteur privé.

« En un mot, je crains ce que nous perdons lorsque nous ne faisons pas confiance aux entreprises », a-t-il affirmé. « Je pense que nous devons fonder notre approche en matière de réglementation sur un principe de confiance, et pas le contraire ».

« Parfois, j’ai l’impression que le point de départ est la défiance, l’absence de confiance, et cela a un impact », a-t-il ajouté.

Contrairement à M. Michel, M. Letta a souligné la nécessité d’un financement public plus important à l’échelle de l’UE et d’une « politique industrielle européenne » pour remédier à son déclin industriel.

« La politique industrielle européenne n’est pas la somme des 27 politiques industrielles nationales », a martelé l’ancien Premier ministre italien en réponse à une question d’Euractiv.

« Le lien avec la finance, l’énergie et les télécommunications est très fort en [cette] matière », a-t-il poursuivi.

Enrico Letta appellera l’UE à adopter une stratégie industrielle rivalisant avec l’IRA américain

L’Europe doit adopter d’urgence des mesures pour promouvoir une « stratégie industrielle compétitive » rivalisant avec la loi américaine sur la réduction de l’inflation (IRA), devrait déclarer Enrico Letta jeudi (17 avril).

Les flux du marché privé sont « un élément clé pour changer la donne »

« En ce qui concerne la comparaison avec l’IRA, le lien avec l’épargne et les marchés financiers est, selon moi, l’un des principaux facteurs de changement que nous pouvons mettre sur la table », a ajouté Enrico Letta.

Quant à l’intégration des marchés financiers, son rapport contient plusieurs propositions détaillées sur la manière de renforcer la compétitivité et les flux d’investissement.

Il s’agit notamment d’introduire un « système à l’échelle de l’UE » pour inciter les citoyens européens à investir davantage, étant donné que l’Union « abrite une épargne privée de 33 000 milliards d’euros, qui se trouve actuellement principalement sur des comptes courants », a-t-il expliqué.

M. Letta suggère que dans les domaines de la dette privée, du capital-investissement et des actifs des PME et des sociétés non cotées, il serait bénéfique de combiner le règlement sur les fonds d’investissement à long terme (ELTIF), qui offre aux investisseurs non professionnels la possibilité d’investir dans des fonds alternatifs, avec des incitants fiscaux nationaux coordonnés.

Pour élargir la participation aux marchés des capitaux, l’ancien Premier ministre italien propose « un cadre [européen] à trois niveaux » qui reconnaît, à côté des investisseurs institutionnels et de détail, une nouvelle catégorie d’« investisseurs qualifiés ».

Un autre moyen d’augmenter les flux de capitaux serait de simplifier les processus d’approbation des « modèles internes » utilisés par les assureurs pour déterminer le capital à réserver afin de couvrir leurs risques d’investissement. Cela pourrait être réalisé en créant une équipe spécialisée chargée de la coordination entre les autorités nationales et l’organisme de régulation des assurances de l’UE.

De même, les exigences en matière de capital bancaire pourraient être révisées et rendues « plus faciles ».

Le marché européen de la titrisation pourrait également être mobilisé pour canaliser davantage d’investissements vers les actifs de l’économie réelle et de l’économie verte, en « réformant » le cadre réglementaire correspondant et en définissant des produits de titrisation verts.

Pour renforcer les investissements dans la transition écologique, M. Letta préconise également l’instauration d’une « garantie verte européenne ». Selon lui, ce système pourrait aider les banques à financer l’économie durable en « neutralisant le prétendu « risque de transition écologique » ».

L’ancien Premier ministre italien, actuellement président de l’Institut Jacques Delors, a également indiqué que les obligations émises par l’UE devraient être placées « fermement au centre de l’architecture financière de l’UE ».

Le mois dernier, Enrico Letta a souligné que « pour la première fois, le marché comptait plus de 1 000 milliards d’euros d’obligations supranationales européennes », émises par des entités telles que la Commission européenne, la Banque européenne d’investissement (BEI) et le Mécanisme européen de stabilité (MES).

Ces actifs notés triple A, « entièrement garantis […] par les États souverains européens », sont négociés séparément en dépit de leur étroite similarité, « ce qui nuit à leur prix étant donné le manque relatif de liquidité provenant de l’émission encore limitée et fragmentée ». Ces obligations, a-t-il ajouté, devraient être rationalisées par le biais d’une « émission unique pour toutes les institutions de l’UE ».

M. Letta appelle également à une consolidation des marchés de compensation et de règlement, en mettant en place une infrastructure unifiée « similaire à celle de la Depository Trust and Clearing Corporation (DTCC) américaine », une société à propriété mutuelle qui s’apparente à un service public.

« À en juger par l’expérience américaine, où la concurrence boursière est forte, il semble qu’il n’y ait pas de besoin apparent de concurrence sur les marchés de compensation et de règlement-livraison, tant qu’il y a un accès équitable et ouvert pour tous les acteurs, une gouvernance appropriée et des incitations suffisantes à l’innovation. »


Anna Brunetti a contribué à la rédaction de cet article.

Un nouveau fonds pour compenser les effets de l’élargissement de l’UE est nécessaire, selon Enrico Letta

Selon un projet de rapport de l’ancien Premier ministre italien Enrico Letta, il est nécessaire de créer un nouveau fonds pour équilibrer les disparités susceptibles d’affecter certains États membres et secteurs de l’UE suite aux prochaines phases d’élargissement de l’UE.

[Édité par Anna Martino]

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