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Avenir européen de la Macédoine du Nord : Défis et opportunités en 2025
Par Benjamin Couteau, chercheur, Institut Jacques Delors (Centre Grande Europe), Iliriana Gjoni, analyste de recherche, Carnegie Europe, Milan Nič, chercheur principal, Conseil allemand des relations étrangères (DGAP), Nikola Xaviereff, chef de projet Balkans occidentaux, Conseil allemand des relations étrangères (DGAP) et Wouter Zweers, chercheur, Institut Clingendael
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Couteau, B., Gjoni, I, Nič, M., Xaviereff, N., Zweers, W. « Avenir européen de la Macédoine du Nord : Défis et opportunités en 2025 », Blogpost, Institut Jacques Delors, décembre 2024
Cet article présente les principales conclusions d’une mission menée conjointement à Skopje par des experts de quatre think tanks européens – l’Institut Jacques Delors, DGAP, l’Institut Clingendael et Carnegie Europe – du 23 au 25 septembre 2024. Cette mission a été organisée avec l’aide du think tank Institute for Democracy (IDSCS) et le soutien d’Open Society Foundations.
Après des décennies passées à relever les défis exigeants de l’adhésion à l’Union européenne, la Macédoine du Nord n’observe toujours pas de progrès tangibles vers cet objectif historique. Sans signal crédible de la part de l’UE, son gouvernement, mené par Hristijan Mickoski après les élections parlementaires du 8 mai 2024, pourrait donc s’avérer réticent à poursuivre les réformes en ce sens. L’UE a de son côté offert, sous la forme d’une réforme constitutionnelle, une solution potentielle à l’actuelle impasse résultant du veto bulgare. Cette réforme permettrait à la Macédoine du Nord d’ouvrir son tout premier cluster de négociation avec l’Union (voir encadré ci-dessous) : le train vers l’UE est en marche — mais la Macédoine du Nord doit être assurée qu’il ne s’agit pas d’un mirage.
L’UE vient par ailleurs d’approuver un plan de croissance pour les Balkans occidentaux fort de nouveaux fonds substantiels pour la région, mais à la conditionnalité politique critiquable. En effet, depuis l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en 2022, l’élan géopolitique qui a ravivé la politique d’élargissement de l’UE a par la même occasion encore un peu plus marginalisé son approche strictement fondée sur le mérite, au profit de considérations plus politiques. Dans ce contexte, le gouvernement macédonien semble donc plus enclin à diversifier ses alliances stratégiques, y compris avec des figures illibérales telles que le Premier ministre hongrois Viktor Orbán et le Président- élu des États-Unis, Donald Trump. Si ses perspectives de progrès vers l’UE se révélaient stériles, la Macédoine du Nord pourrait ainsi voir ses dirigeants consolider leur pouvoir sur le pays, soutenus par ces partenariats alternatifs.
Il revient pourtant au gouvernement macédonien de débloquer sa candidature à l’UE. Presque six mois après son arrivée au pouvoir, force est de constater qu’il n’a toutefois pas activement soutenu la nécessaire constitutionnalisation de la reconnaissance d’une communauté bulgare au sein du pays. Si cette réforme est partie intégrante du processus d’adhésion — et donc indispensable du point de vue de l’UE — pour progresser vers une seconde conférence intergouvernementale (CIG) qui verrait la Macédoine du Nord ouvrir son premier cluster de négociation, le gouvernement macédonien s’accroche en effet à la dépeindre comme une simple proposition. Sans geste fort des deux côtés, la Macédoine du Nord risque donc de se laisser distancer par les autres candidats des Balkans occidentaux, comme en témoigne le récent découplage de sa candidature de celle de l’Albanie, qui vient tout juste d’ouvrir son premier cluster de négociation. Voilà qui pourrait en retour compromettre les objectifs géopolitiques et de transformation qu’a l’UE pour la région.