[EN] Dynamique politique à l’approche des élections au Parlement européen: implications pour l’orientation politique et les priorités stratégiques de l’UE

Cet article vise à analyser les dynamiques politiques qui prévalent à l’approche des élections au Parlement européen, en termes d’évolution du paysage partisan, d’attitudes à l’égard de la poursuite de l’intégration européenne et de fragmentation croissante de la politique européenne. Il examine ensuite leurs implications politiques et institutionnelles, d’abord en termes de participation électorale et de questions saillantes de la campagne, puis en termes d’équilibre des pouvoirs politiques et de politiques européennes pour les cinq prochaines années.
La montée continue des partis « populistes » en Europe
La participation aux élections du Parlement européen a connu un déclin séculaire entre les premières élections de 1979 et 2014. Les élections de 2019 ont mis fin à ce déclin séculaire et ont démontré un regain d’intérêt pour la politique européenne. Dans la perspective des élections de 2024, cette reprise de la participation devrait se poursuivre : premièrement, la sphère politique européenne s’est peut-être éloignée davantage ces dernières années d’une simple dichotomie idéologique entre les partisans et les opposants à l’UE, pour se concentrer davantage sur les priorités politiques de l’UE (du moins en ce qui concerne la campagne électorale) ; deuxièmement, le rôle de l’UE dans la prise de décisions importantes pouvant avoir un impact sur la vie des citoyens est mieux compris ; troisièmement, la situation géopolitique a renforcé l’intérêt d’être membre de l’UE dans un monde plus fragmenté où l’Europe cherche à se positionner distinctement des autres superpuissances.
Thèmes marquants de la campagne : demande politique et attentes des électeurs
Si la question de l’immigration a récemment pris de l’importance dans la plupart des pays européens, les données montrent que d’autres préoccupations et attentes occupent également une place importante pour les citoyens européens. La crise du Covid a marqué le retour de l’importance de la situation économique, et les préoccupations liées à l’inflation restent plus élevées qu’avant le choc énergétique. Les données les plus récentes indiquent une baisse de l’importance du changement climatique. L’importance de la guerre en Ukraine est globalement élevée parmi les citoyens de l’UE, mais avec une certaine hétérogénéité entre les pays.
Quelles sont les projections en termes d’équilibre politique et partisan après juin 2024 ?
Les projections actuelles pour le prochain Parlement européen et l’évolution de la composition du Conseil européen suggèrent l’équilibre des pouvoirs suivant pour la prochaine législature :
- Le centre-droit, le centre-gauche et les libéraux resteraient en mesure de disposer d’une majorité au Parlement européen et au Conseil européen, mais cette majorité serait plus faible.
- Le Parlement européen se déplacerait vers la droite. Cela pourrait conduire le centre-droit (PPE) à chercher à renforcer son influence. Dans l’ensemble, la représentation des groupes politiques eurosceptiques augmenterait, même si la part des groupes politiques clairement pro-UE devrait rester supérieure à 60 %.
- Une plus grande incertitude et une instabilité potentielle au sein du Parlement européen pourraient conduire la nouvelle Commission à rechercher un soutien plus large que la coalition actuelle pour faire adopter des lois, ce qui pourrait réduire l’ambition politique (plus petit dénominateur commun) et la concentrer sur des questions susceptibles de rallier des majorités plus larges. La nomination du président de la Commission européenne constituera un test décisif pour l’équilibre politique du prochain mandat.
Quelle politique européenne pour les cinq prochaines années ?
Sur le plan économique, la compétitivité de l’UE et sa capacité à renforcer ses sources de croissance internes sont devenues des questions clés dans un contexte de risques croissants de fragmentation commerciale et de subventions massives accordées par les États-Unis et la Chine à leurs entreprises nationales dans un contexte de concurrence géopolitique et technologique. Une autre question clé pour la prochaine législature sera le positionnement stratégique de l’UE dans un monde où elle semble relativement moins déterminée et unie dans la défense de ses intérêts et de ses valeurs que d’autres grandes puissances géopolitiques telles que les États-Unis, la Chine ou la Russie.
Cela suggère un programme politique largement déterminé par des défis externes. Cela pourrait également avoir une incidence sur les priorités qui figuraient déjà dans le programme de la législature précédente, telles que les transitions verte et numérique. Une fragmentation politique accrue pourrait toutefois creuser l’écart entre l’ampleur des défis et la capacité à s’accorder sur des réponses ambitieuses. Le choix des personnalités appelées à diriger les institutions de l’UE et la manière dont elles exerceront leurs fonctions seront déterminants à cet égard. Alors que le rôle du président de la Commission devra de plus en plus se concentrer sur la mobilisation d’un soutien multipartite en faveur des initiatives politiques, un président du Conseil européen largement respecté en Europe et dans le monde permettrait d’apporter une vision stratégique à plus long terme et d’agir en tant que gardien de l’Union.