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06/05/15

[EN] Élections européennes de 2014: montée de l’europhobie ou statu quo?

Notre directeur Yves Bertoncini dresse un bilan détaillé des résultats des élections européennes de 2014 dans un document d’analyse qui tire trois enseignements complémentaires.

Une nouvelle victoire pour les partis de la « grande coalition »

Les partis appartenant au PPE et au S&D ont respectivement remporté 29 % et 25 % des sièges, tandis que toutes les autres forces politiques ont obtenu moins de 10 % des sièges. Les représentants élus de ces deux groupes sont appelés à façonner la plupart des décisions du Parlement européen au cours de la législature 2014-2019.

Les partis affiliés au PPE ou au S&D sont arrivés en tête dans 20 des 28 pays de l’UE. Dans trois autres, ce sont les partis affiliés au groupe ALDE qui ont obtenu le plus de voix. Les autres partis n’ont réussi à se hisser parmi les trois premiers que dans de très rares cas, à savoir 22 sur 84.

Une comparaison avec 2009 montre un recul relatif du groupe PPE (29 % contre 36 % des sièges) et une stabilité du groupe S&D (25 % des sièges). Le groupe ALDE est passé de 12 % à 8,9 % des sièges, le groupe des Verts de 7,4 % à 6,6 %, tandis que le groupe ECR est passé de 7,3 % à 9,3 %.

La progression des constellations eurosceptiques et europhobes

Il est utile d’analyser les forces politiques considérées comme hostiles à l’UE tout en établissant une distinction claire entre les partis « eurosceptiques », qui expriment fortement leur mécontentement à l’égard de l’UE, de la zone euro ou de l’espace Schengen, mais ne prennent pas position en faveur du retrait de leur pays, et les partis « europhobes », qui prônent fermement un tel retrait.

Trente partis ou coalitions eurosceptiques, dans seize pays, ont obtenu au moins un siège au PE, tandis que seize partis ou coalitions europhobes, dans treize pays, ont fait de même. Ces partis ont donc gagné environ quarante sièges chacun, avec une augmentation relative beaucoup plus marquée pour les europhobes (+50 % pour les eurosceptiques contre +100 % pour les europhobes).

Cette double progression n’a pas d’impact institutionnel réel au PE, où ces partis ne forment pas un bloc politique cohérent, mais deux constellations disparates. Son impact doit donc être évalué sur le plan politique, en se concentrant sur la politique nationale et le Conseil européen.

L’abstention aux élections de mai 2014 : un niveau normal ?

Le taux d’abstention très élevé enregistré en mai 2014 (57,4 %) s’est révélé relativement stable par rapport à celui de 2009. Les pays de l’UE se sont une nouvelle fois divisés en deux camps : d’un côté, ceux où l’abstention est en hausse et, de l’autre, ceux où elle stagne ou recule.

Le « déficit de participation » aux élections européennes est avant tout lié au « déficit de pouvoir » de l’UE : le taux d’abstention est comparable à celui enregistré lors d’« élections subsidiaires » du même type (élections fédérales en Suisse et aux États-Unis).

Une corrélation entre cette faible participation et une expression de rejet de l’UE peut exister dans des pays comme le Royaume-Uni et la République tchèque, mais elle ne peut s’appliquer à des pays comme la Pologne (faible niveau de méfiance mais faible participation) ou l’Italie (niveau élevé de méfiance mais forte participation).

Les enquêtes qualitatives menées après mai 2014 ne permettent de détecter que quelques signes mineurs d’abstention synonyme de méfiance à l’égard de l’UE. Les racines d’une perception négative doivent plutôt être recherchées chez les électeurs, puisque 7 % d’entre eux ont voté pour exprimer leur désapprobation à l’égard de l’UE.

Ce document d’orientation est la version anglaise d’un article publié en février 2015 dans « L’État de l’opinion 2015 », présenté par Olivier Duhamel et Edouard Lecerf et édité par TNS Sofres et Seuil.