Policy Paper 259
L’Europe a besoin d’une stratégie politique pour mettre fin à la précarité énergétique
Les auteurs souhaitent remercier Marine Cornelis, Sofia Fernandes, Sébastien Maillard, Phuc-Vinh Nguyen, Marta Garcia et Saska Petrova pour leurs précieuses remarques sur ce texte.
Résumé ▪
Cet hiver, des centaines de millions d’Européens sont contraints de rester chez eux en raison des confinements et couvre-feu mis en place pour limiter la propagation de la Covid-19. Pour des millions d’entre eux, cela implique de devoir rester dans des logements mal chauffés, inconfortables mais aussi mauvais pour leur santé.
Ce Policy Paper offre un aperçu de l’état de la précarité énergétique dans l’Union européenne (UE) et de la manière dont les États membres et l’UE traitent actuellement cette question. S’il apparaît que la précarité énergétique a globalement diminué au cours des dernières années ; en 2019, plus de 30 millions d’Européens estimaient ne pas être en mesure de chauffer convenablement leur logement l’hiver.
Face à la précarité énergétique, les États membres ont adopté différentes approches : certains ont tendance à privilégier les mesures palliatives, telles que les aides sociales destinées aux ménages vulnérables, tandis que d’autres adoptent des mesures préventives ou curatives visant à améliorer l’efficacité énergétique des logements et donc à réduire la consommation énergétique. Ces deux types de mesures sont nécessaires pour lutter contre l’une des principales sources du problème, à savoir la faible performance énergétique des bâtiments, tout en aidant les ménages à faibles revenus à s’acquitter de factures énergétiques élevées. La crise économique et sanitaire de la Covid-19 exacerbe la pauvreté énergétique en Europe, mais à quel point ? L’ampleur du problème reste encore inconnue en raison de l’absence de données récentes.
Au cours de la dernière décennie, l’UE a mis en place un ensemble de mesures dont des législations, des partages de bonnes pratiques et des outils de financement pour soutenir les ménages vulnérables et améliorer l’efficacité énergétique des logements. La « Vague de rénovations des bâtiments », initiative récente de la Commission, vise à accélérer la rénovation globale des bâtiments pour augmenter rapidement leur performance énergétique et contribuer à réduire la précarité énergétique. Par ailleurs, au moins 37% des 312 milliards d’euros du Plan de relance européen octroyés aux États membres étant affectés à l’action en faveur du climat, les États membres disposent désormais des moyens financiers pour sortir des millions d’Européens de la précarité énergétique.
Dans ce contexte, les États membres peuvent et devraient adopter des actions beaucoup plus ambitieuses pour lutter contre la précarité énergétique. La majorité des gouvernements nationaux ont pour l’instant une approche fragmentée ou partielle pour remédier à la précarité énergétique, en témoignent leurs plans nationaux en matière d’énergie et de climat, ainsi que les retards dans la préparation de leurs stratégies à long-terme de rénovation des bâtiments. C’est la raison pour laquelle l’UE devrait maintenant développer une stratégie politique pour rendre le problème plus visible. Sortir des millions d’Européens de la précarité énergétique devrait être l’une de ses priorités. Une telle initiative implique une action déterminée de l’Europe à tous les niveaux (UE, national et local).
Ce Policy Paper propose que l’UE et les États membres adoptent une stratégie politique qui se donne pour objectif de sortir tous les Européens de la précarité énergétique, et qui soit un élément majeur du Pacte vert pour l’Europe. Les décideurs européens devraient prendre des décisions tangibles pour montrer que le Pacte vert et le Socle européen des droits sociaux peuvent améliorer de manière concrète le mode de vie européen, à commencer par celui des millions de familles européennes qui ne parviennent pas à chauffer convenablement leur logement. Il s’agirait d’une première étape politique avant de s’attaquer à d’autres aspects de la précarité énergétique, tels que l’incapacité à rafraîchir son logement lors des vagues de chaleur et le fait de ne pas disposer d’un accès satisfaisant aux services de transport du quotidien.