Décryptage

Fonds InvestEU : un Fonds Juncker renommé ?

Il y a près de quatre ans, les dirigeants de l’UE ont approuvé l’idée du président de la Commission alors nommé récemment, Jean-Claude Juncker, pour lancer un «plan d’investissement pour l’Europe». L’élément principal de ce plan était la création d’un nouveau type d’instrument, le « Fonds européen pour les investissements stratégiques » (FEIS), plus connu sous le nom de « Fonds Juncker ». En juin 2018, la Commission a publié sa proposition concernant un « fonds InvestEU », l’instrument d’investissement de l’UE qui remplacera le « fonds Juncker » après 2020. Selon la Commission, le nouveau fonds s’appuie sur l’expérience du FEIS, à cela ? Est-ce juste une opération de rebranding ou sommes-nous devant un instrument différent?

Ce décryptage, rédigé par Eulalia Rubio, chercheuse senior à l’Institut Jacques Delors, et Fleurilys Virel, assistant de recherche à l’Institut Jacques Delors, décrit les principales caractéristiques du Fonds InvestEU, analyse ce que cela change par rapport au « fonds Juncker » (FEIS) et fournit une première évaluation de la proposition législative de la Commission.

Elles concluent que :

  • On passe d’un système composé de 15 instruments financiers de l’UE et d’une garantie de l’UE (EFSI) à un régime unique d’aide à l’investissement de l’UE (Fonds InvestEU). Cela est positif, car cela permettra une plus grande flexibilité et éliminera les doublons entre les instruments de l’UE identifiés dans les évaluations du FEIS.
  • Divers aspects du Fonds InvestEU (un objectif d’investissement plus faible, un meilleur pilotage des politiques) reflètent la volonté de ne plus se concentrer sur la quantité (mobiliser un volume important d’investissements privés) mais sur la qualité (encombrement des investissements privés dans des secteurs spécifiques) . Il s’agit d’une démarche cohérente compte tenu de l’amélioration des conditions d’investissement en Europe.
  • La mise en œuvre du Fonds InvestEU ne sera pas exclusivement confiée au groupe BEI (comme c’est le cas pour le Fonds Juncker), mais à une pluralité de partenaires de mise en œuvre éligibles. Bien qu’il s’agisse d’une décision transformationnelle, cela peut entraîner peu de changements dans la pratique compte tenu des conditions et des limites strictes imposées aux nouveaux acteurs et du fait que la Banque européenne d’investissement (BEI) reste le « partenaire privilégié ».
  • Alors que le « Fonds Juncker » est organisé en deux fenêtres, le Fonds InvestEU dispose de quatre « fenêtres de politique » thématiques (recherche sur les infrastructures durables, innovation et numérisation, PME et moyennes entreprises et investissement social et compétences). Alors qu’une ventilation plus détaillée permet de mieux cibler les besoins d’investissement spécifiques à une politique, l’allocation de ressources proposée n’est pas bien justifiée dans la proposition. À l’heure actuelle, le nouveau Fonds InvestEU couvrira près de la moitié du déficit d’investissement existant dans les PME et les entreprises de taille intermédiaire en Europe, mais seulement 10% du déficit d’infrastructures durables.
  • Le nouveau Fonds offre davantage d’incitations pour transférer une partie des fonds de cohésion des États membres au niveau de l’UE. En particulier, dans le cadre du Fonds InvestEU, les autorités nationales peuvent désigner leur propre banque nationale de promotion pour mettre en place et mettre en œuvre des instruments financiers couverts par la garantie de l’UE.

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