Intervention de Jacques Delors devant le Groupe Socialiste du Parlement européen Bruxelles, 22 mars 2006

Je suis quand même un peu ému d’être ici, de voir tant de camarades, tant d’élus présents. Vous savez que parmi les raisons de ma carrière politique écourtée, c’est que je n’aime guère entrer dans des salles avec applaudissements. Mais je ne pouvais pas refuser aux amis qui se battent tous les jours pour l’Europe.
Au début, j’ai cru que vous alliez me demander comment relancer la construction européenne. Figurez-vous que je n’ai pas de remède miracle et que je ne veux pas vous décevoir. Par conséquent, je vous proposerai quelques petits cailloux blancs sur le sentier de votre réflexion, en espérant, ensuite, pouvoir dialoguer amicalement avec vous. Dans cette phase de crise européenne, est-elle d’ailleurs plus grave que les crises antérieures ? Je ne le sais pas. En tout cas, la situation est très préoccupante. Je crois que l’élément encourageant, pour nous, c’est le travail du Parlement Européen. On peut discuter sur le fonctionnement des autres institutions ou du système mais vraiment, le Parlement Européen est, pour moi, en ce moment, le moteur de la vie européenne, la preuve du caractère indispensable, vitale de la démocratie représentative. Alors que certains, semblant ignorer cette réalité démocratique, préconisaient que, comme dans l’Agora grecque, nous soyons des centaines de millions à débattre de l’avenir de l’Europe au même moment, au même endroit. Pour illustrer ma pensée, j’évoquerai trois de vos textes.