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05/06/25

La jeunesse ou l’avenir de l’Europe

Infolettre juin 2025

L’infolettre complète

Traditionnellement, le mois de juin est pour nous, le mois de notre conférence Jacques Delors qui vient clôturer le parcours annuel de l’Académie Notre Europe. C’est aussi ce mois-là que se prépare la prochaine promotion et que sont recrutés les jeunes qui la rejoindront. C’est donc un mois où la jeunesse occupe une place importante de nos quotidiens et de nos activités. Et justement, après ces longs mois d’hiver, au sens propre comme au figuré, mettre en avant la jeunesse européenne, c’est aussi essayer de déceler une lueur d’espoir dans le chaos de ce monde.

Pour rappel, en 2019, cette jeunesse européenne était dans la rue, pacifique mais déterminée, pour défendre un avenir habitable sur une planète en surchauffe. Elle se dirigea ensuite vers les urnes pour porter un projet européen qui allait dans ce sens. Ce sera le Pacte vert. En 2023 et 2024, elle portait haut la voix des innocents en Palestine, en Iran, ou ailleurs, dans les écoles et les universités, refusant que le monde ferme les yeux sur de telles injustices. Elle criait, parfois très (trop ?) fort, elle chantait, elle rêvait, elle espérait.

Où est-elle en 2025 ? Elections après élections, elle s’abstient comme découragée, peut-être désespérée ? C’est vrai que l’ambiance est morose et l’avenir incertain : la génération Z a déjà traversé deux crises financières, une pandémie, le retour de la guerre en Europe. Elle a vu des atrocités qu’elle n’imaginait même pas, en Ukraine, à Gaza, au Soudan ou ailleurs. Le climat bascule, l’extrême droite progresse et les « backlashs » se multiplient. On peut aisément imaginer que nos jeunes regardent probablement médusés, apparemment déprimés aussi les puissants courir vers le chaos comme des somnambules et les moins jeunes se résigner si facilement. Leur désarroi est palpable, profond, souvent muet, parfois. L’espoir vacille.

Et pourtant, nous n’avons pas le droit de l’abandonner. Alors que l’Europe vieillit à grande vitesse, elle a besoin d’une jeunesse déterminée et combative. Jacques Delors en avait fait un levier central de l’intégration européenne, à la fois comme acteur de l’avenir de l’Europe et comme le public prioritaire des politiques de l’Union. Il avait imaginé le programme Erasmus, qui soutient la mobilité des jeunes, « pour donner une âme à l’Europe ». A l’occasion du centenaire de sa naissance, les jeunes de l’Académie Notre Europe souhaitent lui rendre hommage, en pensant les défis actuels de l’UE à la lumière de son héritage, de sa vision et de sa méthode. Ils présenteront lors de la cinquième édition de la Conférence Jacques Delors, qui aura lieu le 20 juin à la Banque de France, une représentation théâtrale originale, préparée avec le metteur en scène Julien Avril : « Delors entre nos mains – le flambeau de l’architecte ». Nous vous invitons à assister à cette représentation et hommage en vous inscrivant à la Conférence Jacques Delors.

Dans son rapport « Bien plus qu’un marché », Enrico Letta place la jeunesse au cœur de l’achèvement du marché unique. Au travers d’une cinquième liberté, la liberté d’apprendre, de rechercher et d’innover, il pousse à renforcer le droit à la formation, la mobilité et la recherche, partout en Europe. Il imagine aussi une liberté de rester pour que les jeunes puissent choisir de construire leur avenir là où ils sont nés grâce à des soutiens spécifiques aux services publics et d’intérêt généraux, à l’économie locale, sociale et solidaire. Il suggère également la création d’une Conférence permanente des citoyens, à l’image de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, qui inclurait les jeunes et renforcerait la légitimité démocratique. Un an après la présentation du rapport Letta, nous aurons l’occasion de débattre de ces enjeux avec le vice-président exécutif de la Commission européenne, Stéphane Séjourné, invité d’honneur de notre Conférence Jacques Delors.

Erasmus, Corps européen de solidarité, ALMA, dialogues sur la politique en faveur de la jeunesse, nombre d’outils existent pour permettre à chaque jeune de s’engager, d’accéder à une formation de qualité, à un emploi digne, et surtout une parole écoutée, entendue, prise en compte, gage d’un avenir en Europe ou ailleurs. Redonner foi en l’avenir n’est pas un luxe ; c’est une urgence politique. La jeunesse n’a pas disparu : elle attend qu’on la laisse entrer. À nous, aujourd’hui, de rouvrir la porte.

Sylvie Matelly & Sofia Fernandes

Directrice & Directrice adjointe