Rapport
La ratification et la révision du Traité établissant une Constitution pour l’Europe
Cette étude met en perspective le débat actuel sur la ratification et la révision et trace les premières pistes d’une réflexion plus prospective sur l’évolution de ces procédures.
Mais il est deux secteurs où le principe de l’unanimité des Etats membres est particulièrement crucial pour l’avenir de l’Union : la ratification du Traité et sa révision. Dans les deux cas, effectivement, la Conférence Intergouvernementale (CIG) n’a pas opté pour ce que l’auteur de cette étude appelle une « rupture constitutionnelle » qui aurait donné à l’Union les moyens de « s’auto-réformer » sans nécessairement passer par l’approbation de tous ses membres.
En demandant au Professeur Oberdorff de se pencher sur ces deux étapes du développement institutionnel de l’UE, Notre Europe souhaitait à la fois mettre en perspective le débat actuel sur la ratification et la révision et tracer les premières pistes d’une réflexion plus prospective sur l’évolution de ces procédures.
La perspective tout d’abord : non, ce Traité constitutionnel n’est pas inscrit dans le marbre. Certes, l’unanimité reste requise pour la révision du texte. On peut regretter, par ailleurs, que la troisième partie du texte sur les politiques de l’Union n’ait pas été clairement exempte de cette règle. Trois nuances de taille relativisent cependant ce propos.
Tout d’abord, comme l’indique l’auteur, ce nouveau texte se situe dans la continuité de l’approche consensuelle qui constitue le fil directeur de l’histoire de l’intégration européenne. En cela, le Traité actuel n’est pas moins révisable que les textes précédents. Le traité constitutionnel pérennise par ailleurs l’avancée démocratique indéniable qu’est le modèle de la Convention. L’expérience a montré que celui-ci pouvait aider les Etats à surmonter leurs réserves et à dépasser leurs « lignes rouges ». Enfin, le Traité prévoit plusieurs procédures de révision simplifiées et généralisées (alors qu’elles étaient ad hoc auparavant). Il convient de souligner, en particulier, celle prévue pour la partie III du Traité sous la forme de clauses « passerelles » et celle plus précisément dédiée aux politiques et actions internes de l’Union. Il n’est pas extravagant de déduire de ces innovations que la méthode de révision proposée par ce Traité est, en fait comme en droit, plus souple et plus démocratique qu’elle ne l’était avant.
La prospective ensuite : si l’intérêt politique et la légitimité de l’approche consensuelle ne font pas de doute, il apparaît évident qu’une Union d’une trentaine d’Etats membres ne peut continuer de reposer sur des procédures de ratification et de révision requérant l’unanimité. Le droit international, comme le montre l’auteur, est parsemé d’exemples qui prouvent qu’une plus grande souplesse est possible. Le droit européen – et ce nouveau Traité en particulier – regorge également de pistes à explorer, comme l’ont d’;ailleurs fait plusieurs études antérieures (celle du projet « Pénélope » notamment).
Si l’auteur trace quelques pistes de sortie d’un éventuel blocage de la ratification à court terme – dont on déduit d’ailleurs que celle de la « crise salutaire » est la moins réaliste -, son plaidoyer pour une « révision de la révision » se place plutôt sur le moyen terme. Il nous confirme que le projet d’intégration européenne qu’incarne ce Traité constitutionnel n’a rien perdu de son caractère dynamique et évolutif, et qu’il est juridiquement possible de préserver le caractère consensuel du pacte fondamental sans pour autant contraindre l’Europe à une paralysante unanimité.