Accéder au contenu

Le « non » français du 29 mai 2005 : comprendre, agir

L’Histoire ne s’arrête jamais. Elle n’est pas un long fleuve tranquille. Son cours s’étire, alternant crises et embellies en méandres incertains, un jour pour le pire, un autre pour le meilleur. La construction européenne n’échappe pas plus à cette règle aujourd’hui qu’elle n’a pu le faire au cours des cinquante années passées. Hier c’était l’exaltation, lors du spectaculaire avènement de l’euro. Aujourd’hui c’est l’inquiétude, voire le désarroi : après le double « non » opposé par la France et les Pays-Bas au projet de traité constitutionnel, l’état de crise est – implicitement au moins – déclaré. L’Europe institutionnelle est en panne, l’économie stagne et les affrontements budgétaires s’avivent, tandis que l’aire de l’Union continue de s’étendre… L’opinion s’y perd et se cabre. Il est urgent de réagir. Mais comment ? Comment redresser la barre ? Comment réconcilier l’Europe et les Européens ?

Gaëtane Ricard-Nihoul, dans ce texte, s’attache à décrire le processus qui – c’est sa conviction – peut permettre de « désenliser » le convoi communautaire. Mais auparavant, parce que la nature d’un mal doit être bien diagnostiquée si l’on veut que le remède préconisé puisse être salutaire, elle explore minutieusement les causes du « non ». Il s’agit donc ici d’une démarche en deux temps : analyse, puis propositions.

L’analyse révèle quelques surprises et permet de nuancer certaines idées reçues. Un retour sur les enquêtes de sortie des urnes montre, par exemple, que la décision de rejeter le Traité a souvent été prise de manière précoce. On y découvre aussi que la tranche d’âge la plus opposée au traité constitutionnel, celle des « 35-54 ans », comprend celle qui était déjà la plus hostile au traité de Maastricht en 1992 (à savoir les « 25-34 ans »). Et bien d’autres éléments encore qui viennent ouvrir de nouveaux pans de réflexion… au premier rang desquels figure ce que l’auteure décrit comme la différence « d’échelle de référence » entre les motivations du « oui » et du « non » qui nous renvoit au malaise identitaire engendré par la globalisation.