Le pardon et la promesse. Pour une approche plus régionale de la question des Balkans par l’UE

Dix ans après Dayton, six ans après l’intervention de l’OTAN pour mettre fin aux violences au Kosovo, les guerres de succession yougoslaves paraissent bien terminées, mais la succession yougoslave elle-même reste en un sens toujours ouverte. Un référendum doit se tenir le 21 mai 2006 au Monténégro sur le maintien ou non de l’union avec la Serbie. Le statut final du Kosovo n’est pas encore arrêté, même si tout porte à croire qu’il entérinera la dissolution du lien avec la Serbie. Les peuples identifiés par les trois grandes confessions de Bosnie-Herzégovine ne sont pas près de se réconcilier. Les procédures engagées devant le tribunal de La Haye contre les criminels de guerre présumés sont loin d’avoir toutes abouti. Le référendum au Monténégro pourrait donner lieu à une nouvelle manifestation d’un phénomène reconnu et identifié par un journaliste britannique il y a quinze ans. Edward Mortimer parlait du magnétisme destructeur de la Communauté pour signifier que l’attraction exercée par Bruxelles sur la Slovénie et même sur la Croatie avait conduit ces deux républiques à considérer le reste de la fédération comme un fardeau et l’indépendance comme une occasion de se rapprocher plus rapidement des institutions européennes. Ce même argument jouera le 21 mai en faveur de l’indépendance complète du Monténégro, compte tenu de l’état de la relation entre l’Union et Belgrade.
Pour l’Union européenne, principal partenaire politique, économique et commercial des pays des Balkans occidentaux, le moment est venu de faire le point. L’Autriche préside le Conseil et a toujours porté un intérêt marqué aux relations balkaniques. Par ailleurs le processus de désintégration auquel nous avons assisté depuis quinze ans touche à sa fin : on imagine mal de nouvelles sécessions après la détermination des statuts futurs du Monténégro (référendum le 21 mai 2006) et du Kosovo encore que la possibilité d’une partition de la Bosnie Herzégovine ne puisse être complètement écartée ni même celle de la Macédoine. La balkanisation des Balkans occidentaux se prête déjà aisément à la caricature mais le pendule est probablement en fin de course et l’amorce de son retour devrait correspondre à l’avènement d’une phase de renforcement de la coopération, pouvant aller jusqu’à certaines formes d’intégration sans qu’il soit question pour autant de revenir aux structures de l’ancienne Yougoslavie : le tout est de savoir comment donner à ce mouvement la trajectoire qu’il convient. Après avoir donné libre cours à des forces centrifuges, il est temps de mettre en jeu des forces centripètes.