Plan B : comment sauver la Constitution européenne

Le bon mot a fait mouche : la pause de réflexion annoncée par les Chefs d’Etat et de Gouvernement lors du Conseil européen de juin 2005 (au lendemain des « non » français et néerlandais au Traité constitutionnel) se serait-elle muée en pause de la réflexion ?
De fait, les grands débats publics annoncés par les Etats membres, déterminés à retisser les liens usés entre les citoyens et le projet européen, manquent à l’appel. Entre les frustrés d’un « oui » sans conséquence, les défenseurs hier acharnés d’un « non » aujourd’hui sous le boisseau, les faux indécis et les attentistes, le projet de Traité constitutionnel s’est installé dans une position pour le moins bancale.
Dans ce contexte, ce pamphlet d’Andrew Duff vient à point nommé. Le titre qu’il a choisi donne le ton : le moment est venu de lancer le débat sur un éventuel « plan B ». Et Andrew Duff a raison : il est temps que ce plan B non existant alors qu’il était constamment invoqué durant la campagne référendaire française – alors élément de la divagante théorie du complot – soit aujourd’hui précisé, débattu, défait et refait jusqu’à trouver une solution au coma actuel. Sans faire siennes toutes les propositions d’Andrew Duff, Notre Europe a jugé utile de publier son texte comme contribution à un débat dont la relance est indispensable.
Que le lecteur ne soit pas induit en erreur : la stratégie que nous propose le député européen n’est pas celle de la tabula rasa. Membre actif de la Convention, il défend avec vigueur le projet issu du travail de plusieurs années au sein d’une instance dont le caractère démocratique ne devrait plus être à démontrer. Reconstruire, prolonger et améliorer l’existant, à savoir ce projet de Traité constitutionnel, voilà le point de départ que l’auteur nous propose et qui nous paraît relever à la fois de la sagesse et du respect pour les démocraties européennes qui ont déjà approuvé ce texte.
Andrew Duff suggère même de préserver certaines dispositions de ce projet puisqu’elles ne semblent pas avoir été au cœur des controverses des débats de ratification là où ils ont eu lieu, en particulier celles de la première partie véritablement « constitutionnelle » du texte. Mais il ne nous mène pas pour autant vers l’idée d’une mise en œuvre partielle du projet de Traité, dans la ligne de ceux qui prônent l’adoption d’un mini Traité institutionnel. Non, le projet est un compromis global équilibré et doit le rester.
Cette précaution préliminaire ne rend pas pour autant le député européen frileux dans ses propositions de renégociation. Conscient que beaucoup de critiques du texte ont achoppé sur sa troisième Partie, qui définit les politiques de l’Union, Andrew Duff la déclare candidate à l’amélioration, en proposant même les thématiques qui devraient être privilégiées. Plus le détail se précise et plus on entre dans les eaux plus troubles de l’opportunité d’ouvrir tel ou tel débat, d’insérer tel ou tel enjeu dans le Traité, mais le mérite de l’approche de Duff est d’être sans aucun tabou : gouvernance économique, dimension sociale, changement climatique, élargissement et finances sont les cinq sujets qu’il propose de mettre sur la table.