Rapport
L’Italie, l’Europe et la présidence 2003
Décrypter les perspectives de la présidence italienne de l’Union européenne est une tache particulièrement difficile. Dès qu’il s’agit de politique, l’Italie n’est jamais facile à lire. Pour notre sujet, les orientations qu’elle entend donner à sa présidence, la difficulté se trouvait accrue par l’attitude des autorités italiennes qui conjuguent une discrétion tout à fait inhabituelle sur leurs intentions, un style de relations internationales souvent déroutant et un engagement européen plus tiède et plus hésitant que par le passé, du moins en apparence. Également disponible en italien.
Avant-Propos de Jacques Delors
Je suis particulièrement reconnaissant à Roberto Di Quirico d’avoir accepté de décrypter pour nous les perspectives de la présidence italienne de l’Union européenne et leurs déterminants, parce qu’il s’agissait d’une t che particulièrement difficile. Dès qu’il s’agit de politique, qu’elle soit nationale ou européenne, l’Italie n’est jamais facile à lire et c’est d’ailleurs ce qui fait un de ses nombreux charmes. Pour notre sujet, les orientations politiques qu’elle entend donner à sa présidence, la difficulté se trouvait accrue par l’attitude des autorités italiennes qui conjuguent une discrétion tout à fait inhabituelle sur leurs intentions, un style de relations internationales souvent déroutant et un engagement européen plus tiède et plus hésitant que par le passé, du moins en apparence. Avec beaucoup de finesse, Roberto Di Quirico nous explique que ce nouveau positionnement et sa difficulté d’interprétation tiennent à une situation intérieure particulièrement tendue : exacerbation des clivages, instabilité du système politique qui a succédé à la « première république » et crainte existentielle d’un « déclin »économique, social et moral du pays.
Le thème européen, qui a toujours été au centre du débat italien s’en trouve à la fois éclipsé par les préoccupations d’ordre interne et instrumentalisé par les réponses à ces préoccupations. Même si l’expérience nous a enseigné que l’Italie se sort en général, mieux qu’elle ne le dramatisait, de ce genre de situation, le paysage actuel me paraît empreint d’une gravité inhabituelle. Ce qui explique en particulier que notre auteur se soit trouvé contraint de se départir d’une certaine neutralité universitaire et nous ait livré une étude plus « engagée » que ne le sont généralement celles de cette série. Ce que laisse chaque présidence dans l’histoire de la construction européenne tient cependant moins à ses intentions qu’aux contraintes de l’agenda.
Et le deuxième semestre 2003, au carrefour entre l’élargissement, l’approfondissement et la programmation budgétaire des ressources et des politiques va particulièrement solliciter la présidence italienne. Ce sera en un sens la période de tous les dangers, parce que l’Union devra y résoudre des questions vitales pour son avenir, alors qu’elle est aujourd’hui plus divisée qu’elle n’a jamais été. Dans un tel contexte, le rôle de la présidence sera moins de proposer des initiatives tonitruantes que de rapprocher les points de vue. Elle dispose pour cela, entre autres atouts, du cumul des fonctions de présidence du Conseil européen, de présidence de la Commission et de vice-présidence de la Convention ce qui, soit dit en passant, n’est pas trop mal pour un pays au bord du déclin. A elle d’additionner ces forces potentielles, plutôt que d’en faire un instrument supplémentaire de division. Elle en aura en tout cas le plus grand besoin pour affronter les échéances décisive s que le calendrier lui impose.