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Merz-Macron, le duo franco-allemand de la dernière chance
Chronique publiée en partenariat avec L’Opinion
Le moteur franco-allemand tourne à vide depuis trop longtemps. La victoire de Friedrich Merz aux législatives du 23 février pourrait le faire redémarrer. Avec le futur chancelier, Paris retrouve une personnalité rhénane francophile classique avec laquelle elle saura mieux composer. D’abord sur le fond, ce chrétien-démocrate, dont Wolfgang Schäuble fut le mentor, a la construction européenne dans son ADN politique. Le mot Europe abonde dans son programme Il affiche plusieurs positions-clés mieux compatibles avec les vues françaises. Ses premières déclarations aux accents presque gaullistes dimanche soir l’attestent. Avec lui, Macron pourrait enfin trouver le complice qui lui a manqué outre-Rhin depuis 2017.
Merz défend l’autonomie stratégique européenne. Il est en faveur de l’envoi de missiles de longue portée (Taurus) pour l’Ukraine. Il n’est pas contre revenir sur la règle constitutionnelle disputée limitant le déficit annuel du gouvernement fédéral à 0,35 % du PIB pour doper l’investissement. Il laisse entrouverte la porte à des émissions obligataires européennes pour la défense. Et il a toujours considéré la sortie du nucléaire comme une erreur stratégique – bien qu’il reconnaissance sa relance désormais irréaliste. Pour sa part, la France devra mettre de l’eau dans son vin anti-Mercosur que défend le futur chancelier – comme ici ses prédécesseurs – plus encore maintenant qu’une guerre commerciale gronde avec l’administration Trump.
Mais, même ainsi rehuilée, la vocation du moteur franco-allemand n’est plus d’être tout terrain, ni de prétendre tirer toute l’Europe à lui seul. De plus en plus et à divers niveaux, le duo fait place à un trio avec la Pologne (format Weimar). Friedrich Merz envisage son premier déplacement officiel tant à Paris qu’à Varsovie. De son côté, le président Macron prépare un sommet avec le premier ministre polonais, Donald Tusk, pour signer un traité d’amitié dans la veine de ceux récemment conclus avec Rome et Madrid, tandis qu’un grand sommet bilatéral franco-britannique se profile pour rafraîchir les traités de Lancaster sur la défense.
N’attendons donc pas un retour du franco-allemand à l’ancienne. Espérons plutôt que cette relation sans pareil prendra sa part indispensable dans un jeu élargi qui répond au turbulent changement d’ère en cours. Paris et Berlin retrouveront une force d’entraînement s’ils se concentrent sur des dossiers-clés. L’union des marchés de capitaux, renommée union pour l’épargne et l’investissement, en est assurément un pour contribuer au financement de la triple transition numérique, énergétique et sécuritaire, qui guide l’agenda européen. Dans cette même perspective, le franco-allemand doit mettre aussi tout son poids dans la production industrielle européenne et pour faire émerger de nouveaux champions européens. Comme Paris, Merz veut réviser le droit européen de la concurrence.
Mais, même si la relation personnelle entre lui et le chef de l’Etat s’annonce plus fluide qu’avec Scholz, sa portée dépendra d’abord de l’évolution des situations politiques respectives dans chaque pays. En Allemagne, la grande coalition à deux partis en discussion devrait épargner le pays des tensions internes et positions illisibles, qui ont épuisé la coalition tripartite sortante. En France, la stabilité gouvernementale est une condition pour être pris au sérieux par ses partenaires. Surtout, de part et d’autre du Rhin, la virulence des droites extrêmes et leur connivence avec l’axe Trump-Poutine donnent aux deux dirigeants une obligation de résultats à leur étroite collaboration, au risque d’une panne de moteur définitive.
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